“Severed
Trust“
de Georges Lundberg
Mathieu
Ozanam
4 septembre
2002
Que
l’information soit passée inaperçue au cœur de l’été ou qu’elle
n’émeuve plus grand monde, aucune réaction n’a accueilli la publication
par la CNAMTS de l’état des remboursements de santé. Entre les sept
premiers mois de l'année 2001 et les sept premiers mois de l'année
2002, les dépenses de soins de ville ont cru de 6,7%. Autre problème
qui se fait ressentir un peu plus cruellement chaque année pendant
la période des congés estivaux : le manque de personnel hospitalier,
auquel participe la pénurie d’infirmières. Aux Etats-Unis, un rapport
de la Commission jointe d’accréditation des établissements de soins
(JCAHO), institution chargée de l’évaluation des hôpitaux et cliniques
américains, révèle que 24% des accidents qui entraînent la mort
ou d’importantes séquelles sont dû à l’insuffisance des effectifs
infirmiers. Plus de 126 000 postes ne seraient pas pourvus.
Deux systèmes de santé d’inspiration différente, au fonctionnement
différent, auxquels se posent pourtant les mêmes problèmes.
Le
tiers payant à l’origine du mal ?
Georges
Lundberg, rédacteur en chef pendant 15 ans du JAMA (Journal of the
American Medical Association), avant d’en être remercié en 1999,
porte un regard critique sur l’état du système américain en connaissance
de cause dans son ouvrage Severed Trust : Why American Medicine Hasn’t
Been Fixed. S’il se félicite du travail remarquable des
Centres de contrôle et de prévention des maladies (CDC) et des National
Institutes of Health (NIH), s’il loue le professionnalisme des professionnels
de santé et reconnaît que les établissements de soins et les laboratoires
pharmaceutiques figurent parmi les meilleurs au monde, il juge que
le système de santé n’en pas moins vicié. A l’origine de ce mal,
l’introduction du tiers payant qui, en rompant tout lien financier
entre le malade et le professionnel de santé, lui a fait perdre
la notion de la valeur des actes, entraînant un accroissement de
la demande de soins.
Education
à la santé en ligne
En
digne fondateur du site santé Medscape, il plaide
pour l’utilisation de l’Internet pour l’information et l’éducation
des patients. Il appelle les médecins à encourager les malades à
aller sur la Toile en guidant leurs pas vers tel site dans leurs
recherches. 60 à 70% des questions posées par les patients au cours
des consultations resteraient sans réponse faute de temps ou d’en
connaître la réponse. L’instauration d’un climat de confiance passe
aussi par un accès partagé au dossier de santé électronique du patient.
Les conflits qui dégénèrent et se règlent devant les tribunaux ont
souvent pour origine une mauvaise compréhension qui naît d’un manque
de communication.
Un
accès public à la National Practitionner Databank
Toujours
dans cette perspective, Georges Lundberg milite pour rendre accessibles
au grand public les informations de la National
Practitionner Databank, comme c’est le cas dans certains Etats
dont le Massachusetts. Cette base de données a été créée par le
Congrès américain pour faire face à l’augmentation des erreurs médicales
et des litiges qui en découlaient et pour contribuer à l’amélioration
de la qualité des soins. L’inscription des professionnels de santé,
médecins, chirurgiens-dentistes et autres, qui ont fait preuve d’incompétence,
restreint les possibilités pour aller s’installer dans un autre
Etat par exemple.
Face
à une erreur médicale, il plaide pour une méthode en 4 étapes :
- Identifier
l’erreur, ce qui implique d’exercer une veille attentive pour
pouvoir la reconnaître,
- Informer
les membres de l’équipe médicale concernée par le suivi du malade,
- Analyser
la situation pour savoir si le patient doit être averti, en prenant
en considération son état émotionnel et son état de conscience,
- Documenter
l’erreur pour éviter qu’elle se reproduise.
La
contribution de Georges Lundberg sur les évolutions du système de
santé américain n’est par sans rappeler des éléments de débats en
France. Il est en ce sens utile aux réflexions en cours.
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septembre 2002
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