Myriam
Le Goff - Pronost
Economiste
à l’Ecole
Nationale Supérieure des
Télécommunications Bretagne
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"Les
systèmes de télémédecine ne sont rentables que pour
un certain volume d’utilisation, c’est-à-dire pour
un certain nombre de patients (ou de films) examinés"
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Propos
recueillis par Hervé Nabarette
20
septembre 2001
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Les
applications en sont souvent à un stade expérimental... Ceci n'est-il
pas gênant pour généraliser les résultats d'une évaluation médico-économique ?
La
généralisation des résultats est pour l’instant difficile à mettre
en œuvre. En effet, on assiste à l’explosion de projets isolés chacun
portant sur une spécialité médicale différente avec des résultats
qui dépendent fortement des variables environnantes et des agents
impliqués, ainsi que de la technologie utilisée. L’évaluation doit
également tenir compte du fait que la télémédecine est en phase
d’implantation, elle s’appuie donc sur une période d’observation
relativement courte marquée par des ajustements, qui disparaissent
ensuite. Ceci conduit à des échantillons de taille restreinte qui
ne peuvent induire des résultats statistiques valides. Ensuite,
la télémédecine est basée sur des technologies qui sont en évolution
constante. La vitesse à laquelle les technologies de l’information
changent rendent obsolètes la plupart des hypothèses faites sur
la capacité et les coûts de ces systèmes. Ainsi, l’évaluation économique
devrait être menée de façon itérative et non plus seulement en un
point du temps, ce qui risque de la rendre encore plus coûteuse.
Pouvez-vous
donner des exemples de critères considérés dans les analyses coût-
efficacité ?
La
plupart des études utilisent la simple méthode de minimisation des
coûts pour la télémédecine. Il s’agit alors de comparer les différents
coûts impliqués par la télémédecine par rapport à la pratique traditionnelle.
Cette méthodologie n’est pas satisfaisante dans la mesure où elle
ne saisit qu’une partie de la réalité des projets. Cela rend ses
conclusions limitées et ni les bénéfices réels ni le meilleur usage
possible des ressources ne sont déterminés. Les critères d’efficacité
pris en compte sont essentiellement le nombre de transferts évités,
le nombre d’examens évités, le nombre de déplacements évités.
Pour
vous, alors qu'il est démontré que certaines applications sont coût
efficace, comment peut-on expliquer leur difficulté à se développer ?
La
difficulté de la télémédecine à se développer est expliquée par
un certain nombre d’obstacles à dépasser :
-
Tout d’abord les problèmes de financement des projets de télémédecine.
Pour l’instant, ces projets ont été soutenus par des organismes
collectifs, publics ou privés qui les subventionnaient pour
le temps de la mise en place. Mais qu’en sera-t-il dans quelques
années, cinq ans par exemple, moment lorsque les technologies
seront devenues obsolètes et qu’il faudra les remplacer ?
Les financements semblent être un frein important au développement
des projets car une subvention est nécessaire au démarrage.
Il existe, de plus, beaucoup de projets différents avec des
objectifs différents, ce qui nécessite une politique publique
volontaire de développement de la télémédecine de la part de
l’Etat, qui pourrait établir des axes directeurs. La mise en
place de Périn@t va dans ce sens, dans la mesure où l’Etat avait
prévu une enveloppe d’environ 3 millions d’euros d’aide au financement
pour la mise en place d’un réseau de visioconférence entre les
maternités françaises ;
-
Les aspects légaux et éthiques ne sont pas résolus ;
-
Des
incertitudes touchant la sécurité, la confidentialité des données
et la responsabilité médicale existent ;
-
Au
niveau technique, aucune norme ni standard ne se sont encore
imposés, ceci pose des problèmes de compatibilité ;
-
Il
reste également l’instauration d’un modèle de remboursement
des actes.
La
télémédecine doit être menée en réponse à un besoin de santé publique
d’abord, organisationnel et sociale ensuite. L’évaluation économique
de la télémédecine est un exercice qui ne s’avère pas simple. Peut
être est-ce l’explication du peu d’intérêt qu’on lui a porté jusqu’à
maintenant ? Pendant longtemps, le monde médical a été quelque
peu réticent à toute entrée de considérations économiques dans leur
domaine, or les méthodes d’évaluation sont le symbole même de la
monétarisation de leur action. Cependant, pour justifier le développement
prochain des projets de télémédecine, il faudra démontrer également
ses résultats financiers. Tous ces éléments conduisent à recommander
une adaptation des outils économiques à cette nouvelle technologie
afin que les décideurs puissent croire en toutes les potentialités,
même économiques, de la télémédecine.
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20
septembre 2001
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