Israël
Nisand
Chef
du service de gynécologie obstétrique
CHU de Strasbourg
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Maxppp
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Jurisprudence
Perruche : "c'est à la solidarité
nationale d'intervenir".
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Propos
recueillis par Mathieu
Ozanam
8 mars
2002
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Le
Pr Israël Nisand a été avec le Pr René
Frydman à l'origine du mouvement de protestation des échographistes
face à la jurisprudence Perruche. Une façon d'alerter
le gouvernement qui, ne désirant pas légiférer
"à chaud", avait repoussé en décembre
la proposition de loi de Jean-François Mattéi stipulant
que "nul n'est recevable à demander une indemnisation
du fait de sa naissance".
Pour
protester contre l'arrêt Perruche vous avez lancé avec
le Pr Frydman un appel à la grève des échographies,
la nouvelle loi telle qu'elle a été votée à
l'Assemblée nationale en première lecture vous satisfait-elle ?
Il
ne s'agissait pas d'une grève mais compte tenu des nouvelles
dispositions et du nouveau contrat entre la société
et les médecins, j'ai estimé que nous ne pouvions
plus assurer le dépistage prénatal. Nous avons obtenu
du gouvernement qu'il légifère en janvier, alors qu'il
tergiversait en décembre. La loi nous satisfait sur deux
points : la fin de la jurisprudence Perruche et l'impossibilité
pour l'assurance maladie d'engager une action récursoire
(NDLR : c'est-à-dire la possibilité de se tourner
vers le médecin pour lui faire supporter tout ou partie du
remboursement des sommes versées).
L'alinéa 3 ne nous satisfait pas dans l'état actuel
des choses (NDLR : l'interview a été réalisée
avant l'adoption définitive de la loi par le Sénat,
le 19 février). Nous aurions souhaité que l'on distingue
entre le préjudice moral lié au non-diagnostic, pour
lequel nous estimons que si la faute du médecin est avérée,
sa responsabilité est engagée pour la réparation
du préjudice moral. En revanche la réparation du préjudice
matériel lié à la naissance d'un enfant handicapé
nous paraît être davantage de l'ordre de la solidarité
nationale et non des assurances médicales.
Dorénavant
un enfant ne pourra plus porter plainte, mais ses parents sont toujours
fondés à demander une indemnisation pour préjudice
matériel. Qu'est-ce que cela change pour les médecins ?
Cela
change tout du point de vue symbolique et éthique. Quelle
est la nature de la plainte émanant d'un enfant, si ce n'est
d'être né, car si le diagnostic avait été
fait, il ne pourrait pas se plaindre, il aurait été
avorté. Je pense qu'un handicap ce n'est pas un préjudice
et qu'aucune indemnisation ne pourra jamais réparer le handicap.
Je me répète : c'est à la solidarité
nationale d'intervenir. Un pays dans lequel le handicap doit être
indemnisé et non pas aidé, marche sur la tête.
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