Antibiotiques
et antibiothérapie
Ce qui pourrait (enfin)
changer
Suite
2
De quoi parle-t-on
? Consommation antibiotique et résistances
Le marché mondial de
lantibiothérapie représentait en 1997 près de 17 milliards
de dollars US (105 milliards de francs) avec une part consommée
en ville qui sélevait à 12 milliards de dollars US (75 milliards
de francs), soit 70 % de la consommation (Carbon
C BMJ 1998 ; 317 : 663-665).
Daprès les statistiques
publiées par le SNIP,
Les antibiotiques représentent 6 % du chiffre daffaires du
marché mondial du médicament, qui sélève à 293 milliards de
dollars (1800 milliards de francs - source IMS pour 1997 - en prix
producteur).
En revanche, le marché
des antibiotiques continue de croître en valeur, passant de 15 milliards
de dollars en 1993 à 17 milliards de dollars en 1997. Or, pendant
cette période, le nombre de prescriptions est resté quasi inchangé.
En France, sur le marché
de la ville, les antibiotiques arrivent en troisième position des
médicaments consommés avec respectivement 8,1 % du chiffre daffaires
et 6,2 % des unités vendues.
Initialement apparues
dans les hôpitaux, les résistances aux antibiotiques entraînent
un surcoût économique et social très élevé en raison des facteurs
suivants :
- Augmentation de la morbidité et
de la mortalité,
- Prolongation des traitements et
des durées de séjours,
- Accroissement des coûts liés aux
mesures préventives.
En 1996, les hôpitaux
américains dénombraient 2 millions dinfections nosocomiales
annuelles. Leur coût global séchelonnait de 600 dollars (4000
francs) pour une infection urinaire à 40 000 dollars (250 000 francs)
pour une septicémie (Jarvis
WR Infect control Hosp Epidemiol 1996 ; 17 (8) : 552-557).
En France, une enquête
nationale menée par le Réseau National de Santé Publique (RSNP)
et publiée par le Bulletin
Epidémiologique Hebdomadaire en 1996 dans 830 établissements
montrait que le taux de prévalence des infections nosocomiales sélevait
à 7,6 %.
Des extrapolations
réalisées à partir de cette enquête montrent que les durées de séjour
sont prolongées en moyenne de 3 à 7 jours ;
elles ont également permis de calculer que le surcoût des infections
nosocomiales est de 5 000 à 10 000 francs par malade.
Ceci pourrait représenter un total de 2 à 5 milliards de francs
par an, soit 2% des dépenses hospitalières. A cela s'ajoute le coût
social (maison de rééducation ou de repos, traitements...) ainsi
que le coût humain et familial (non reprise du travail, perte d'emploi,
déplacements, retentissement psychologique...). [cliquez ici
pour en savoir + grâce au laboratoire de santé publique de lUniversité
de Tours]
En ville, le surcoût
dû aux résistances bactériennes est nettement plus difficile à estimer
faute dinformations suffisantes. Le problème posé par les
résistances nen est que plus préoccupant, notamment en raison
des facteurs favorisant leur dissémination (élevage, voyages, alimentation).
Un débat
agité
Le débat sur la consommation
des antibiotiques nest pourtant pas nouveau et ne se limite
pas à la France. Dès 1968, les scientifiques britanniques ont cherché
à évaluer les phénomènes de résistances bactériennes et leurs implications
(Tucker
A BMJ 1998 ; 317 : 1521). L'un de ces chercheurs,
Anderson, concluait dans un article resté célèbre que les conséquences
des résistances bactériennes étaient si importantes que la mise
en place dun organisme chargé de cette question de santé publique
était incontournable (Anderson, ES BMJ 1968 ; iii : 333-339).
Léphémère Swann
Committee, cité dans cet article "danticipation ",
avait ainsi recommandé, dès cette époque, dinstaurer une surveillance
de lusage des antibiotiques en médecine vétérinaire et humaine.
Rapidement enterré, ce projet montre aujourdhui que le fossé
entre les besoins de santé publique et la politique réellement menée
sest agrandi au fur et à mesure.
Lapparition et
la dissémination des résistances sont désormais des phénomènes de
grande ampleur au niveau mondial. La recherche fondamentale sur
les mécanismes mis en jeu par les bactéries et les informations
épidémiologiques suscitent en outre des doutes sur la possibilité
déradiquer les germes pathogènes dans lavenir.
Dès lors, il nest
pas sûr que les antibiotiques permettront de contrôler durablement
le problème. Si la mise à disposition dun nouvel antibiotique
a permis jusquà présent de répondre à chaque forme de résistance
bactérienne, cette démarche rencontre aujourdhui des limites
puisquaucune nouvelle classe dantibiotiques na
été développée depuis vingt-cinq ans. Larsenal antibiotique
pourrait savérer insuffisant à moyen terme pour faire face
au problème des bactéries multirésistantes qui apparaissent et se
répandent désormais aussi bien à lhôpital qu'en ville.
Suite
et fin de l'article
11 mai 1999
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