Décembre 2000
Chantal
Lachenay-Llanas,
Directrice de l’Accréditation à l’ANAES
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"L’accréditation
n’a d’intérêt que si elle permet le lancement
d’un processus d’amélioration continue de
la qualité dans les établissements."
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Propos recueillis
par Elisa
Yavchitz et Julie
Chastres
27
novembre 2000
Pouvez-vous nous expliquer les différentes étapes de la démarche
d’accréditation ?
La procédure
d’accréditation donne lieu à l’envoi par l’établissement
d’une demande d’engagement à l’ANAES.
Ensuite, l’accréditation débute, à proprement
parler, par une phase d’autoévaluation réalisée
collectivement par les professionnels de l’établissement.
Cette autoévaluation s’effectue en s’appuyant sur les référentiels
de l’ANAES. Quelques mois après, il reçoit la visite
d’experts-visiteurs que l’agence a formés. A l’issue de
cette visite, ces experts-visiteurs, indépendants, rédigent
un rapport d’expert qui constitue le premier document sur lequel
l’établissement peut formuler ses observations.
Dès lors,
le collège de l’accréditation de l’ANAES est destinataire
de deux documents : le rapport des experts et les observations
de l’établissement au rapport des experts. Sur cette base,
le collège doit statuer et formuler ses propres appréciations
qui s’expriment dans la première version du rapport d’accréditation.
Cette version est transmise à l’établissement pour
qu’il puisse formuler des éventuelles contestations. S’il
n’y a pas de contestation le rapport provisoire devient définitif.
Il donnera lieu à la réalisation d’un compte rendu
d’accréditation, celui-ci est rendu public via l’établissement
ainsi que sur le site Internet de l’ANAES.
Dans le cas où
un établissement souhaite formuler des contestations auprès
du collège, celui-ci se ressaisit du dossier, formule une
deuxième délibération et rédige, après
cette deuxième itération un rapport d’accréditation
définitif dont sera extrait le compte rendu, qui sera publié
sur le site Internet.
Du fait de ces différentes
étapes, une procédure d’accréditation dure
en moyenne une année, entre la réception du dossier
d’engagement et le moment où le compte rendu est rendu
public sur internet. Dans l’absolu, cela peut paraître long
mais la procédure obéit à des règles
de qualité interne. En particulier, les nombreux échanges
entre l’établissement et les experts ou le collège
sont autant de garanties d’une interaction entre l’agence, qui
est une agence professionnelle, et les professionnels de terrain
dans les établissements. Nous voulons être dans une
logique d’aide et être au service de l’amélioration
continue de la qualité. Cela ne saurait être confondu
avec une logique de sanction. L’accréditation n’est pas
un couperet qui tombe sans que l’établissement n’ait droit
de réponse. La durée du processus d’accréditation
est une garantie du respect de ses principes de fonctionnement.
Je dis toujours que
l’accréditation n’a pas d’intérêt en soi,
et à ma place cela peut paraître paradoxal, elle
n’a d’intérêt que si elle permet de promouvoir un
processus d’amélioration continue de la qualité
dans les établissements
Aujourd’hui, combien d’établissements ont déposé une demande d’engagement
dans la procédure d’accréditation?
Entre 220 et 230 établissements
ont, à ce jour, déposé un dossier d’engagement
dans la procédure d’accréditation. Nous allons avoir
un afflux énorme de demandes d’ici avril prochain car 3500
établissements sont concernés par la démarche.
D’ailleurs, depuis la rentrée, beaucoup d’établissements
anticipent l’échéance du 24 avril 2001 et une nette
accélération du rythme des dépôts se
fait sentir.
La date du 24 avril
2001, qui dans les ordonnances Juppé était indiquée
comme la date butoir de l’engagement dans la procédure
d’accréditation, sera-t-elle maintenue ?
Elle est maintenue
pour le dépôt des dossiers d’engagement. Cela ne
veut pas dire que tous les dossiers seront traités immédiatement.
Le monde hospitalier est un monde complexe et l’on veut respecter
la nécessaire maturation d’un système qualité
interne aux établissements
Il y aura donc, au
moment du dépôt du dossier, une proposition de planification
par l’établissement de la réalisation de son autoévaluation
et de la visite des experts. Aujourd’hui, certains établissements
considèrent qu’ils sont prêts, ils ont réalisé
leur autoévaluation et demandent une visite au printemps
2001. D’autres souhaitent s’engager mais ne pourront réaliser
leur autoévaluation que dans un an. Au delà de l’accréditation,
le paysage hospitalier français vit en ce moment une recomposition
importante. Les établissements en fusion ou restructuration
peuvent ne vouloir recevoir la visite durant ces transitions ;
nous sommes très soucieux de respecter ces contingences.
Cette logique de planification des échéances rend
compatible le caractère obligatoire du dépôt
du dossier d’engagement avec une logique de respect du rythme
de chaque établissement.
3500 établissements à accréditer : L’ANAES tiendra-t-t-elle
les délais qu’elle s’est fixé ?
Nous prévoyions
de finaliser la première itération de l’accréditation
d’ici 5 à 6 ans. Comme vous le savez, l’accréditation
est un processus continu qui doit se renouveler tous les 5 ans.
Notre objectif est donc de finaliser la procédure de 500
établissements par an.
Que deviendront les établissements qui auront des avis avec réserve
majeure ?
Le collège
peut formuler 4 types d’appréciation : une accréditation
sans recommandation, avec recommandation simple, une accréditation
avec réserve simple, et même avec réserve
majeure. Dans ces deux dernières situations, le collège
sollicite soit un rapport de suivi, soit une visite ciblée
pour s’assurer de l’avancement de l’établissement sur les
points spécifiques qui ont appelé sa réserve.
Sur le site Internet,
deux établissements ont dores et déjà, des
comptes rendus comprenant une accréditation avec réserve
simple. Des points d’amélioration ont été
mis en exergue que l’établissement sera conduit à
corriger et des visites ciblées seront menées par
des experts visiteurs, les conclusions de ces visites ciblées
seront réexaminées par le collège de l’accréditation
qui pourra être amené à lever ces réserves.
En cas de réserve
majeure, situation à laquelle le collège n’a pas
encore été confronté, les réserves
devront aussi être levées par l’établissement
concerné.
Quel est l’objectif de l’utilisation d’Internet dans votre démarche ?
Internet nous permet
de mettre tous nos outils à dispositions des professionnels
: manuel d’accréditation, guides pédagogiques, supports
pédagogiques sont tous téléchargeables sur
notre site.
Mais la mise sur
Internet permet aussi de satisfaire les besoins des usagers :
Internet est un moyen d’accélérer le processus de
mise à disposition auprès du grand public des résultats
de l’accréditation des établissements. Conscient
que l’outil Internet n’a pris une place suffisante auprès
du grand public pour que ces résultats soient réellement
à disposition de tous, nous avons créé un
serveur vocal qui de façon complémentaire permet
au public non-internaute d’accéder aux comptes rendus d’accréditation.
Nous développons donc une palette d’outils de communication
pour la mise à disposition des comptes rendus : l’établissement
en premier lieu, car il est le premier destinataire du compte
rendu, ensuite Internet, puis le serveur vocal.
En mettant à
disposition du grand public les résultats de l’accréditation,
l’ANAES offre une alternative publique aux comparaisons d’établissements
réalisées par le Figaro Magasine ?
Le point commun entre
le Figaro Magazine ou Science-et-Avenir et l’ANAES est effectivement
l’option de transparence sur le fonctionnement des établissements.
Je pense que la comparaison peut s’arrêter là, puisque
l’accréditation est une démarche globale qui porte
sur l’ensemble de l’organisation. Disposer d’un palmarès
concernant les pathologies n’est pas du tout le sujet de l’accréditation.
Il est cependant
évident que l’accréditation apporte au public des
garanties quant à la tenue du dossier médical, la
présence d’une permanence médicale 24h/24, l’utilisation
dans les domaines qui les concernent des recommandations de pratiques
cliniques qui permettent de garantir la meilleure qualité
de prise en charge du patient.
Comment les petits établissements peuvent rentrer dans une démarche
d’accréditation alors qu’ils sont dans une pénurie de moyens ?
Je crois que l’opposition
entre les démarches qualité des petits et des gros
établissements n’est pas à effectuer. Ainsi quand
on regarde les 230 établissements engagés, on a
toutes les catégories d’établissements. Certains
ont moins de 30 lits et d’autres sont des grosses structures hospitalières.
Je ne crois pas qu’il faut faire de corrélation degré
de préparation démarche qualité versus la
taille de l’établissement.
Mais les petits établissements ont des difficultés à embaucher
un responsable qualité ?
C’est probablement
plus difficile, mais on voit que des solutions émergent
pour les établissements qui n’ont pas le dimensionnement
budgétaire nécessaire à l’embauche d’un responsable
assurance qualité, en particulier, dans la mutualisation
des moyens inter établissement. Par exemple, des établissements
s’organisent en syndicats, groupements hospitaliers (Aquitaine,
Nord pas de Calais) ou créent un système associatif
avec des ressources partagées. L’accréditation nécessite
de travailler en multi-professionnel en interne mais si les gens
travaillent en multi-professionnel en externe, cela dépasse
nos espérances. Il est donc très intéressant
de voir que les professionnels trouvent des solutions originales,
adaptées à leur contexte et qui répondent
aux questions posées.
Quelle est votre utilisation d’Internet dans votre pratique professionnelle
quotidienne ?
Je l’utilise effectivement.
J’ai quelques favoris que je consulte fréquemment :
par exemple certains journaux auxquels j’accède via Internet
mais aussi le site des fédérations hospitalières.
Mes collaborateurs regardent notamment les sites Internet des
établissements de santé quand ils préparent
les dossiers d’accréditation