L’innovation
à l’hôpital
Olivier
Lenay, François Engel,
Jean-Claude Moisdon :
Innovations
et financement
dans le système hospitalier ou
comment rendre l’innovation visible ?
19
février 2001
Suite
et fin (3/3)
Olivier
Lenay a présenté un article sur « Innovations et financement
dans le système hospitalier ou comment rendre l’innovation visible ? »
(auteurs : Olivier Lenay, François Engel, Jean-Claude Moisdon).
L’innovation
médicale semble être constitutive de la dynamique du secteur hospitalier.
Pourtant, elle n’est pas pleinement appréhendée par les systèmes
d’information et de financement actuels. Les auteurs ont observé
le développement d’un service de cardiologie et ont analysé les
modes de financement possibles de l’innovation.
Stratégies locales de développement et d’innovation
L’observation
part du cas d’un service de cardiologie et qui s’est progressivement
doté des dernières technologies en matière de coronarographie. La
stratégies de développement et d’innovation du service obéit à :
-
une
logique médicale d’innovation thérapeutique : elle consiste
à être les premiers à s’installer sur un créneau thérapeutique
-
une
logique de concurrence : elle
consiste à anticiper à chaque étape du développement une concurrence
de la part de l’environnement, dresser des barrières à l’entrée
qui interdisent progressivement à tout compétiteur potentiel
de venir s’installer sur le territoire ainsi délimité.
Pour
construire ces barrières, le service a tissé un réseau de relations
et constitué une filière de soins cohérente : en aval, et en
amont pour le recrutement. Cet exemple montre que l’innovation déborde
les frontières de l’hôpital et qu’elle ne concerne pas seulement
les savoirs diagnostiques et thérapeutiques. Quelle est la position
de la direction de l’établissement par rapport à la stratégie de
ce service ? Premièrement, la direction réagit au dépassement
des sommes imparties, en faisant des rappels à l’ordre sur les dépenses
de consommables médicaux ou prothèses, dont les budgets prévisionnels
sont fréquemment dépensés dès le milieu de l’année. Deuxièmement,
la filière constituée par le service échappe en partie à la connaissance
de la direction de l’établissement : la direction a envoyé
des courriers aux fournisseurs de patients du service, mais a oublié
le plus gros d’entre eux.
Evaluation et financement de l’innovation
Les
auteurs analysent les modes d’évaluation et de financement possibles
de l’innovation.
Ils
font état des travaux d’un groupe de travail qui a planché sur l’appréhension
de l’innovation par le PMSI. Ce groupe a établi une liste des innovations
technologiques ou médicamenteuses non prises en compte dans le PMSI,
et a calculé le surcoût occasionné par chaque innovation et pour
le coût total pour certains CHU innovants. Cette étude montre notamment
deux choses. Premièrement, il s’avère que de nombreux établissements
sont innovants, du fait d’initiatives émanant de professionnels
actifs. Il n’est donc pas possible d’attribuer un financement en
fonction du statut ou de la taille des établissements, ou de la
discipline. Deuxièmement, ce type d’évaluation du surcoût de l’innovation
est une tâche de contrôle infinie : l’ampleur de la tâche interdit
sa reproduction régulière par les tutelles.
D’autre
part, aucun mode de financement traditionnel n’apparaît satisfaisant.
Le prix de journée, généreux, permet de financer l’innovation mais
il finance aussi des dépenses inefficaces. Le budget global peut
s’appuyer sur le PMSI. Mais le niveau de détail de la classification
en GHM ne permet pas toujours d’identifier les services qui développent
de nouvelles stratégies thérapeutiques innovantes. Dans le cadre
du budget global, la direction de l’hôpital assume en partie la
charge de la répartition des moyens aux différents services, sur
la base d’éventuels indicateurs de gestion interne issus du PMSI
et sur l’identification des stratégies, mais on a vu qu’elle les
cernait mal. Concernant les mécanismes incitatifs du type « concurrence
par comparaison » qui visent à accroître l’effort de réduction
des coûts, ils ne résolvent pas le problème d’identification de
l’innovation.
En
fait, le PMSI s’apparente à une logique de régulation, qui envisage
l’hôpital comme une structure de production. Or il existe une autre
logique utilisée par les pouvoirs publics, qui passe par l’identification
des « bons » producteurs, des seuils d’activité, de la
présence de certains équipements dans telle ou telle structure…
Il s’agit d’une logique de planification qui devrait intervenir
dans la réflexion sur le financement de l’innovation. Elle pourrait
inspirer une nouvelle génération de PMSI. Les modes de financement
de l’innovation devraient tenir compte du lieu où s’élabore la stratégie
médicale (service, département, spécialité) et de la coopération
existante entre différentes structures pour mettre en place une
filière d’innovation cohérente. Elles devraient aussi rendre les
structures responsables collectivement des choix faits pour chaque
entité d’innovation.
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19 février 2001
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