La
théorie de l’innovation
Louis
André Gérard Varet et
Jean-Paul Moatti :
Economie
des dynamiques de l’innovation :
quelle pertinence pour l’innovation
médicale et biotechnologique ?
19
février 2001
Les
droits de propriété intellectuelle garantissent l’effort de
R&D
L’effort
de R&D des industries pharmaceutiques est énorme. Les industries
nord américaines consacrent 1/3 de cet effort aux biotechnologies,
qui représentent moins de 5% de leur chiffre d’affaires. Les dépenses
de R&D constituent un risque pour ces entreprises dans la mesure
où elles n’offrent pas la certitude d’aboutir à un produit commercialisable.
Lorsque les efforts de R&D aboutissent à un produit commercialisable,
les brevets garantissent à l’entreprise l’amortissement de ses dépenses
de R&D en lui octroyant une forme temporaire d’exclusivité d’usage,
et stimulent ainsi l’effort de R&D.
La brevetabilité des découvertes biologiques
Avant
la décision de 1980 de la Cour Suprême américaine, la brevetabilité
du vivant n’existait pas. En 1987, le PTO (Patent and Trademark
Office) a entériné la protection des gènes par le système de brevet
dès lors que leur fonction a été préalablement identifiée. L’Europe
a attendu plus d’une décennie avant de s’aligner sur la législation
américaine. Une directive de juillet 1998 reconnaît la brevetabilité
d‘une séquence (ou d’une séquence partielle) d’un gène, même si
celle-ci « préexistait à l’état naturel », « du moment
qu’elle est isolée de son état naturel ou produite à l’aide d’un
procédé technique ». L’appropriation privée est étendue à une
partie de la base commune de connaissance susceptible de développements
industriels biotechnologiques présents ou futurs. Une fois la brevetabilité
du vivant reconnue en Europe, les entreprises de biotechnologie
se sont multipliées.
L’antagonisme entre intérêts individuels
et efficacité collective
Les
firmes biotechnologiques sont exclusivement centrées sur la connaissance
scientifique. La brevetabilité du vivant peut réduire le champ des
connaissances scientifiques exploitables par l’industrie. L’attribution
de droits de propriété intellectuelle trop larges ou trop longs
peut être une barrière à l’innovation et à la concurrence. L’attribution
d’un brevet doit résulter d’un arbitrage entre ces deux logiques
et garantir l’efficacité collective et individuelle.
On
peut notamment citer le brevet accordé par le PTO à la firme myriad
Genetics depuis 1988 sur les gènes gène de susceptibilité aux cancers
du sein et de l’ovaire. Ce brevet couvre toute reproduction de l’ADN
et tous les produits qui en sont dérivés (méthodes diagnostiques
et applications thérapeutiques). Du fait de ce monopole, des laboratoires
hospitaliers américains qui réalisaient des tests génétiques pour
ces cancers ont du abandonner leurs recherches.
La coopération entre le public et le privé
comme alternative aux brevets
Les
partenariats entre des firmes privées et des laboratoires de recherche
publics autour de programmes communs de R&D constituent une
alternative aux brevets de plus en plus employée en Europe. Il s’agit
de négociation entre un agent générateur de connaissances (un laboratoire
public de recherche qui produit de la connaissance scientifique
sous condition de l’apport d’un financement extérieur, mais qui
ne dispose d’aucun moyen de développement industriel) et un utilisateur
de la connaissance de base (une entreprise qui n’est pas en mesure
d’accéder seule à l’information scientifique/technologique, mais
peut réaliser le développement industriel). La répartition, entre
les différents acteurs, du surplus espéré se fait en amont.
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19 février 2001
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