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Qu'entend on
par produits dits de "thérapie génique" ?
Il
s'agit de stratégie thérapeutique consistant à livrer, directement
au sein des organes malades, grâce à des vecteurs vivants ou synthétiques,
des gènes censés produire, comme autant de microscopiques laboratoires,
des protéines utilisés à la guérison. Les patients pourront ainsi,
à partir de l'analyse d'une séquence de leur génome, se voir proposer
le traitement adéquat.
Si les projets, dits
du " génome humain ", sont emblématiques
de la biotechnologie et captent toutes les attentions, il ne faut
pas négliger les très nombreux programmes de recherche actuellement
en cours. Aucune thérapie génique na encore atteint le seuil
de la commercialisation, mais 250 produits seraient actuellement
au stade des essais cliniques. Un produit de Novartis
(contre un des cancers du cerveau) serait même en phase III.
Le défi de la biotechnologie est autant scientifique que financier
Les investisseurs prennent
un risque financier considérable. Le choix de la voie génétique,
pour trouver les médicaments de demain, suppose en effet des investissements
lourds sans assurance de retombées commerciales futures. Ce phénomène
est amplifié par le fait que, même si les recherches cliniques aboutissent,
il n'y a aucune garantie que les produits soient autorisés sur le
marché.
En somme, les recettes
ne sont pas contemporaines aux dépenses. Ce phénomène ne
favorise pas le développement des activités biotechnologiques, et
certains pays ont déjà pris du retard faute d'investissements suffisants.
"Les cycles de développement en biotechnologie sont de 18
ans, confirme Alfred Berkeley (Président du "Nasdaq Stock
Exchange"), alors qu'ils sont de 18 mois dans les autres
Nouvelles Technologies". On constate néanmoins, depuis
1995, une nouvelle vague d'investissement avec une prise de risque
plus importante liée au succès des recherches relatives au "génome
humain".
Le marché financier
américain, et en particulier le "Nasdaq
Stock Exchange", favorise les start up et le
financement des études cliniques, équipements informatiques ou autres
infrastructures indispensables aux recherches.
On remarque que l'industrie
pharmaceutique a conclu des alliances avec des sociétés spécialisées
dans la génomique : Smithkline
Beecham est ainsi partenaire de Human Genome Sciences,
Glaxo
Wellcome de Sequana
ou encore Synthelabo
et Johnson & Jonhson de Genset.
Ces projets coopératifs
témoignent de la vitalité de l'industrie biotechnologique, regroupée
d'ailleurs en une association forte de plus d'un millier de sociétés
adhérentes, la "Biotechnology
Industry Organization".
Ainsi que le rapporte
Constance
Loizos (Herring, mai 1998), une enquête d'Ernst
and Young, datant de 1997 a révélé que seules cinq sociétés
sont compétitives sur ce marché. Les autres ont un problème de cash
flow et seules 2 % seraient rentables. Le développement des
licences croisées permet aux entreprises de poursuivre leur travail
de façon indépendante tout en coopérant avec les autres.
La politique actuelle
des start up est de proposer des services spécifiques aux
laboratoires pharmaceutiques afin de fidéliser un large éventail
de clients par des programmes moins ambitieux et moins aléatoires
qu'auparavant. Les start up entendent également prendre en
charge le développement de médicaments en essais cliniques.
Le leadership des USA
en matière de recherche biotechnologique s'explique d'une part par
un financement adapté et d'autre part par l'existence de structures
coordonnées.
Le DOE
(Departement Of Energy, qui dépend de l'Office de Recherche
Biologique et Environnementale), et le NIH
(National Institut of Health) sont ainsi unis par des plans
quinquennaux.
Le DOE comprend des
laboratoires nationaux, travaillant spécialement sur l'informatique
et les Nouvelles Technologies de l'Information. Il travaille
au séquençage du génome dans son entier à la différence de nombreuses
sociétés commerciales qui se concentrent sur certaines séquences
du génome. Les scientifiques affirment que moins de 5 % du génome
total seraient "intéressants". Le NIH s'intéresse, lui,
plus spécifiquement, à tout ce qui touche la Santé Publique.
Le directeur du programme
"génome humain" au sein du DOE a rappelé, au cours d'un
récent entretien,
que le gouvernement américain investit, depuis le début des années
80, 300 millions de dollars par an sur le projet.
Le congrès
républicain a qualifié le programme "génome humain" "d'essentiel".
Bill
Clinton et Al
Gore le présentent comme le "projet central du
nouveau siècle de la biologie".
La déclaration triomphale
de Craig Venter,
patron de l'Institut
de Recherche Génomique, a donc fait l'effet d'un coup de tonnerre.
Son séquenceur serait à même de déterminer l'ordre des trois milliards
de nucléotides de notre patrimoine héréditaire.
Les scientifiques discutent
et critiquent abondamment la technique retenue par Craig Venter.
Quoi quil en soit, cette déclaration relance la compétition
entre les différents centres de recherche dans la quête du décryptage
du génome humain. La fondation médicale anglaise "Wellcome
Trust" a ainsi d'ores et déjà déclaré doubler le financement
accordé au "Sanger
Center" de Cambridge.
L'un des principaux
enjeux de cette technologie réside dans le fait que le marché est
inexistant : celui qui commercialise une thérapie génique crée un
marché à part entière contrairement aux autres activités de l'industrie
pharmaceutique qui se disputent des parts d'un même marché. Le projet
très médiatisé du génome humain a crée une demande, des opportunités
apparaissent donc pour commercialiser les recherches.
A présent, le marché
porteur est celui de la réalisation d'équipements permettant les
innovations biotechnologiques. Il est en effet nécessaire de recourir
aux Nouvelles Technologies de l'Information afin de pouvoir archiver
et partager l'information de façon efficace.
La fuite actuelle des
cerveaux et la pénurie de bio-informaticiens illustrent cette situation.
Les bio-informaticiens sont des ingénieurs sachant gérer l'information
bioéthique. Ils mettent en oeuvre des protocoles et systèmes intelligents
permettant de gérer les données. La phase de repérage des gènes
est en effet réalisée sur des séquenceurs automatiques capables
de lire plusieurs millions de base par jour. Des SSII commercialisent
des logiciels de gestion des données tandis que certains centres
de recherches demandent jusqu'à 5 millions de dollars annuels pour
donner accès à leurs données traitées.
La France et la recherche bio-technologique
La France, sans faire
partie des nations leaders sur ce marché, développe des programmes
ambitieux. Depuis le prix Nobel,
en 1965, de Monod, Jacob et Lwoff de lInstitut
Pasteur la recherche française fait en effet plutôt bonne figure.
La France est actuellement
représentée par des industriels comme Transgène (société
strasbourgeoise), Genset
ou Bio-Mérieux Alliance.
La recherche française
peut espérer tirer parti de son expérience même si elle souffrira
probablement d'un problème de taille et de financement. En ce qui
concerne plus spécifiquement la bio-informatique, il a été crée
le "Biogen".
Il s'agit d'un Groupement d'Intérêt Scientifique ayant
pour mission d'être un pôle de bio-informatique à vocation nationale
et d'offrir un ensemble de bases de données de biomolécules et de
génomes.
Le Généthon
est la structure française de recherche la plus médiatique
et contribue à sensibiliser lopinion publique aux enjeux des
thérapies géniques. Citons également des organismes publics tels
le "Centre National de Séquençage du Génome" (dirigé
par Jean WEISSENBACH) ou le CNRS
qui développe un "programme Génome", sous la responsabilité
de Francis GALIBERT.
En guise de conclusion
L'industrie pharmaceutique
dépense chaque année 40 milliards de dollars en Recherche et Développement.
La situation actuelle confirme que les laboratoires augmentent la
part affectée à la biotechnologie. Le financement potentiel est
donc considérable et les développements des thérapies géniques très
importants. Pour plus d'informations, vous pouvez visiter un site
entièrement consacré à l'industrie bio-tech et proposant
de nombreux liens vers les centres de recherche internationaux.
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8
juin 1998
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