Le
recrutement des patients
dans le cadre des
maladies rares et orphelines

Nicolas
de Saint Jorre
1er
février 2001
Le
Téléthon a permis de rendre populaire en France une problématique
qui, par nature, touche peu le grand public, celle des maladies
rares. Ces maladies dont la prévalence ne dépasse pas 5 cas sur
10 000, intéressent peu les chercheurs et les laboratoires pharmaceutiques
du fait des difficultés à rentabiliser les investissements nécessaires
à la mise au point des médicaments (que l’on dit orphelins). Grâce
aux 500 millions de francs de promesses de dons du Téléthon, l’Association
Française contre les Myopathies prévoit un effort particulier
en faveur des maladies rares pour lesquelles 148 demandes de programmes
de recherches ont déjà été déposées.
La recherche, le développement et les maladies
rares…
Les
maladies rares sont par définition si peu fréquentes que les coûts
de la recherche et du développement ne sont pas amortis par la
mise sur le marché du produit. Cette rentabilité fragile est accentuée
par la non-brevetabilité des molécules issues du secteur pharmaceutique.
Pour inciter les recherches, les Etats-Unis ont mis en place,
dès 1983, des politiques d’incitation à la mise au point de médicaments
orphelins (« Orphan Drug Act »), celles-ci ont permis
le développement d’environ 900 médicaments. Des pratiques semblables
ont vu le jour à partir de 1993 au Japon.
Les actions communautaires dans le domaine
L’Europe,
sans doute en raison de son morcellement étatique, reste en retard
sur cette question. Compte tenu de la faible prévalence de ces
maladies, une action communautaire est la plus appropriée (et
surtout la plus viable) afin d’accéder à un marché le plus vaste
possible. D’après le SNIP, il y aurait en Europe 4 à 5 000
maladies rares, qui toucheraient entre 25 et 30 millions de personnes
sur une population globale de 370 millions de personnes.
C’est
dans cet esprit que le 04 février 1999, la Communauté européenne
a adopté un programme concernant les maladies rares, visant à
faciliter l'accès à l'information sur celles-ci, en particulier
pour les personnes touchées, les professionnels de la santé et
les chercheurs. Ce programme prévoit entre autres la création
d’un réseau européen d’informations sur les maladies rares (notamment
via l’Internet).
Grâce
au règlement n°141/2000 du Parlement européen et du Conseil concernant
les médicaments orphelins, les entreprises du secteur de la Santé
peuvent désormais demander à l’Agence européenne de désigner,
pour l’évaluation des médicaments (AEEM), certains de leurs médicaments
comme « médicaments orphelins ». Ils bénéficient alors
des avantages suivants :
-
exclusivité commerciale (pendant au maximum 10 ans),
-
exonération de la redevance liée
à l’autorisation de mise sur le marché.
Cette
déclaration doit se faire avant le dépôt de la demande d’autorisation
de mise sur le marché.
Une nécessité : optimiser le cycle
de développement des médicaments orphelins
Pour
les maladies orphelines, la recherche et le développement doivent
bénéficier d’une qualité identique aux autres maladies. Compte
tenu de la faible rentabilité des médicaments, il faut optimiser
le cycle de développement du médicament en minimisant ses coûts.
Le recrutement des patients devient dans ce contexte un enjeu
important : les méthodes de recrutement classiques utilisées
par les médecins participants aux études cliniques peuvent être
associés à un recrutement sur Internet. Le laboratoire peut ouvrir
un espace sur son propre site web, permettant aux médecins mais
aussi aux patients de s’inscrire dans l’essai clinique.
Il
peut être également efficace de passer par des sites web associatifs
tel que le site Orphanet en France qui
touche une population très ciblée.
Sur
ce site, par exemple, il suffit de télécharger le formulaire de
demande de mise en ligne de l’information se rapportant à l’essai
clinique en fournissant les informations suivantes :
-
les références du promoteur (le fabriquant du médicament),
-
les
coordonnées de l’investigateur coordonnateur (le médecin responsable
de l’essai),
-
les
informations sur l’essai lui-même,
-
les
critères d’inclusion,
-
le nom du médicament concerné par l’essai
-
une
copie du formulaire de consentement.
De
plus, le site Orphanet permet aux médecins praticiens, mais également
à toute personne concernée par les maladies rares, de trouver
des informations pertinentes sur leur définition, leur histoire
naturelle, leur mode de prise en charge, leur traitement et les
lieux de prise en charge. On peut notamment faire des recherches :
-
par
maladie,
-
par
laboratoire de diagnostic,
-
par
essais cliniques,
-
par
programme de recherche,
-
par
consultation,
-
par
association,
-
par
professionnel
-
ou
par médicament.
Les sites portails : leur audience
contre la rareté…
Les
sites portails grand public sur la santé, de par leur très fort
niveau d’audience, pourraient également dans le futur participer
à ce type de recrutement efficace. Des rubriques dédiées au recrutement
des investigateurs et des patients pourraient se développer. Ces
espaces pourraient proposer aux visiteurs du site, de l’information
sur les essais cliniques concernant les maladies rares, avec un
formulaire électronique d’inscription en ligne. Si les portails
français n’ont pas encore développé ce type de projet, le procédé
« d’appel public » au recrutement des patients est dores
et déjà réglementé : il doit être mentionné et décrit au
sein d’un dossier soumis au Comité Consultatif de Protection des
Personnes dans la Recherche Biomédicale (CCPPRB) et un dossier
de « déclaration d’un traitement automatisé d’informations
nominatives » doit être déposé à la CNIL. Ce recrutement
électronique permettra aux laboratoires pharmaceutiques de mieux
évaluer les potentialités de développement de la recherche des
médicaments orphelins…
L’internationalisation inéluctable de la
recherche sur les maladies rares
De
par son caractère universel, l’Internet est un média tout à fait
adapté aux problèmes posés par les maladies rares : les professionnels
de santé, les chercheurs, les malades et leur famille disposent
là d’un outil unique dans l’histoire de la santé humaine. L’Internet
rapproche les hommes (même si ce rapprochement se limite encore
aux grands pays industrialisés) et créé des communautés mondiales
de patients et de professionnels. Le volume induit par cette internationalisation
devrait permettre aux laboratoires pharmaceutiques de mieux gérer
leur recherche et développement en améliorant la rentabilité de
ces médicaments orphelins.
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