Résumé de l'article

L’Internet produit de nouveaux services et de nouveaux modèles économiques. Les infomédiaires sont les nouveaux intermédiaires de l'information. Ils diminuent les coûts de recherche dans le monde réel et sur le net, ils captent l'information sur le client et l'utilisent à des fins commerciales, mais ils sont aussi des agents du consommateur et lui permettent de trouver les biens et services qui lui conviennent au moindre prix, créant ainsi des "marchés renversés" où les clients sont rois.

Quel est le rôle des infomédiaires ?

Les nouvelles technologies de l'information ont fortement réduit les coûts de traitement et de transport de l'information ces vingt dernières années. Les possibilités de contact direct entre producteurs et acheteurs ont augmenté. Les intermédiaires ne se limitent pas à une simple rôle de coordination, ils procèdent une intégration des besoins des consommateurs et des producteurs, ce qui explique leur croissance actuelle.

Les infomédiaires aident les consommateurs à chercher l'information, à identifier leurs besoins, à sélectionner les biens et services en fonctions de ces besoins. Ils prennent également en charge les risques encourus par les vendeurs (retour des articles) et assurent la distribution des produits. Ils se spécialisent dans la gestion du profil des internautes, et leurs permettent de se réapproprier leur profil marketing.

Les utilisateurs de l'Internet sont en effet rapidement submergés par les mails publicitaires et les annonces des produits, et l'information dont ils disposent est parcellaire et asymétrique - offres complexes, données biaisées, impossibilité d'inspecter le produit ou de bien connaître le vendeur. Les consommateurs sont donc finalement livrés à eux-mêmes dans leur décision d'achat. Les infomédiaires, en triant l'information, éclairent le choix des utilisateurs.

Il existe des moyens pour protéger la vie privée des internautes, et pour contrôler l'information les concernant : logiciels d’anonymisation, suppresseurs de cookies, filtres contre le spam (mail non sollicité), moyens de paiement anonymes… Cependant, dans leur grande majorité, les utilisateurs ne prennent pas le temps de gérer eux-mêmes leur droit à la vie privée. Les infomédiaires peuvent les y aider en mettant à leur disposition des outils destinés à protéger la confidentialité. Mais ils adoptent aussi une attitude nouvelle en acceptant de rémunérer les clients pour les informations qu’ils acceptent de livrer sur eux-mêmes.

Pour établir un profil précis du client, les infomédiaires lui fourniront bientôt un logiciel espion à installer sur son PC. Ce logiciel scannera les déplacements et les transactions sur le web. Pour valoriser le profil ainsi analysé, l’infomédiaire mettra en place des services : aide à l'achat, ciblage marketing (où l’on s’inscrit pour recevoir tel type de messages publicitaires, c’est le "permission marketing" qui rompt avec les pratiques agressives), identification de l’acheteur contre rémunération, analyse des données personnelles, permettant de fournir au particulier un rapport périodique sur son activité Internet.

L’infomédiaire protège et vend l’information personnelle du consommateur suivant sa volonté, et il interdit aux marketeurs de démarcher le client pour des produits qu’il ne cherche pas.

Il rend également service aux producteurs en disséminant l’information sur leurs produits, en influençant l’achat et en assumant une partie du risque producteur (vol, fraude, stocks…). Il leur fournit également de l'information sur les consommateurs, et leur permet d'économiser sur les coûts de transaction. [Pour en savoir + sur la théorie économique relative aux nouveaux coûts de transaction et aux nouveaux intermédiaires, cliquez ici.]

Les infomédiaires, en réduisant les coûts de transaction et en privilégiant la relation client, vont donc obliger les industries tournées vers le consommateur à se repositionner. Les techniques de marketing seront revues afin d’attirer le client (et non l’importuner), de lui fournir une aide à l’achat et à l’utilisation des produits achetés et de lui proposer un grand nombre de ressources rassemblées sur un site web. A l'extrême, des clients rassemblés sur une plate-forme auront la possibilité d'influencer les pratiques commerciales et d'exiger plus de transparence dans les informations.

Quels sont les secteurs d'avenir pour les infomédiaires ?

Les infomédiaires trouveront un marché à chaque fois qu’ils réaliseront des économies d’échelle ou des gains d'utilité suffisamment importants pour le compte des individus. Ceci est possible quand les coûts de recherche sont élevés, que les distorsions de prix sont fortes (par exemple le marché automobile), et que la rentabilité par consommateur est variable pour le vendeur. Par ailleurs la marchandise doit avoir un fort contenu informationnel , et il doit être possible d’acheter et de livrer à distance (voyages, ordinateurs…).

D'après ces critères, les marchés les plus intéressants pour les infomédiaires seraient l'achat de logement ou de véhicules, les services médicaux, les assurances.

Le secteur de la santé présente en effet des spécificités qui justifient l'émergence d’intermédiaires spécialisés. L'asymétrie d'information est importante et le consommateur a du mal à se repérer dans des systèmes de soins complexes. Il y a donc de la place pour des acteurs tiers qui aideront les patients à définir leurs besoins, leur permettront d'avoir accès à un "second avis", contribueront à l’évaluation des offreurs et des soins, et aideront les patients face à des producteurs très liés aux payeurs (comme les HMO).

Le marché des entreprises est également riche en promesses pour les infomédiaires "Business to Business" ("B to B"). Beaucoup de PME sont aussi désemparées que les individus face à la profusion du web, et partagent les inquiétudes du client de base sur la protection de leurs données. Dans ce contexte, les infomédiaires sont des "market makers" qui ont pour rôle essentiel de permettre à un groupe fragmenté d'entreprises acheteuses de se mettre en relation avec un groupe fragmenté d’entreprises vendeuses. L’intermédiaire est perçu comme une tierce partie, neutre et donc digne de confiance.

Pour gagner sur ce marché, l’infomédiaire B to B doit réussir à devenir le portail spécialisé de la profession dont il veut gérer les transactions. C'est pourquoi la plupart d'entre eux fédèrent et offrent à la consultation sur leurs sites un maximum d'informations professionnelles ou proposent des services spécialisés.

Pour l'instant, on trouve ces infomédiaires B to B dans les domaines de la chimie, de l'acier, du papier, dans le secteur des transports, des ressources humaines. Dans le secteur de la santé, Hospital Network s'adresse aux décideurs du monde hospitalier. Il leur fournit des informations professionnelles, des actualités, les tendances. Ils y trouvent de l'information juridique, des données récentes sur la recherche, sur les produits commercialisés et les vendeurs.

Qui seront les futurs infomédiaires ?

Certains services web à fort potentiel pourront devenir infomédiaires : les portails comme Yahoo qui aident les utilisateurs dans leurs recherches sur l’Internet, les communautés virtuelles comme Motley Fool qui relient les utilisateurs partageant un sujet d’intérêt, les agrégateurs de transactions comme Amazon qui facilitent la rencontre d’un grand nombre de vendeurs et de consommateurs.

Ces acteurs sont pour l'instant loin de remplir les conditions requises. Ils doivent se constituer une base de profils de consommateurs, construire un réseau de partenaires, et parvenir à retenir chaque protagoniste dans leur sphère d'influence. Ils deviendront alors experts dans l’extraction de la valeur informative pour chaque marché, l’influence du comportement des participants, et l’anticipation fine de l’évolution des marchés.

Les contours des infomédiaires sont encore incertains. Seront-ils généralistes ou plutôt spécialisés, comme tend à le montrer la multiplication de portails spécialisés dans le B to B ? Laisseront-ils le choix final au consommateur, où se montreront-ils directifs ? Le consommateur pourra-t-il facilement changer d'intermédiaire ? Il semble en fait que l’intermédiation prendra des formes différentes suivant le type de biens et services achetés.

Pour consulter la définition des coûts de transaction, cliquez ici. Pour en savoir + sur la théorie économique relative aux nouveaux coûts de transaction et aux nouveaux intermédiaires, cliquez ici.

Lire l'article entier

Réagissez à cet article.

5 octobre 1999