Professeur
Louis Lareng
Directeur
de l’Institut Européen de Télémédecine
|
|
Dans
le domaine du recours à la télémédecine pénitentiaire,
la France peut être considérée comme un exemple.
|
|
|
Propos
recueillis par
Hervé Nabarette et Elie
Lobel
4 septembre
2002
2/2
Sommes-nous
encore dans un cadre expérimental, ou ces technologies se généralisent-elles ?
On
peut considérer que la télémédecine constitue pour les établissements
pénitentiaires l'une des formes les plus adaptées de l'application
à la santé des technologies de l'information et de la communication.
La transmission d'images animées, d'images fixes, de données médicales,
avec présence ou non du patient, assure une continuité de soins
qui conforte la sécurité d'un traitement. Nous
ne sommes plus à l'ère des expériences ; la mise en place d'une
telle pratique médicale se développe progressivement, car les professionnels
de santé ont de plus en plus conscience que la médecine, allant
du singulier au pluriel (B. Glorion), fera appel à des pratiques
où la technologie permet la pluridisciplinarité professionnelle
et la complémentarité des compétences.
L'important,
à l'heure actuelle, est d'assurer la pérennité de ces services qui
dépend d'une reconnaissance de cette plus-value médicale par les
organismes sociaux assortie d'un financement absolument indispensable
pour assurer l'amortissement des moyens mis en oeuvre (humains,
équipements,communications, etc...).
Quel
est aujourd'hui en France l'état sanitaire de la population carcérale ?
Existe-t-il une vraie problématique d'accès aux soins ?
L'état
sanitaire de la population carcérale a été bien décrit aussi bien
par des ouvrages récents que par des enquêtes de l'Administration.
Il est incontestable que la télémédecine peut apporter une plus
value aux soins de cette population. Les caractéristiques d'un établissement
pénitentiaire font cohabiter aussi bien l'isolement d'un prisonnier
qu'une vie collective. Ceci favorise la propagation des maladies.
Dans ce contexte, les mesures de santé sont plus délicates à appliquer
rapidement tant dans le domaine de la prévention que de la précaution
et de la thérapeutique. Face à cette situation, la télémédecine
est de nature à améliorer les décisions à prendre en urgence. La
t élémédecine, nouvelle pratique médicale, favorisera également
l'éducation sanitaire, pilier de prévention, à l'intérieur même
des établissements. En ce qui concerne les consultations individuelles,
il est évident que les prisonniers seront mieux suivis et aussi
souvent que cela sera nécessaire dans un contexte de protection
de la dignité de la personne humaine, de confidentialité et de déontologie
strictement respectées.
La
télémédecine pénitentiaire peut-elle s'inscrire dans le cadre réglementaire
et sociologique actuel ?
Il
n'y a pas d'inconvénient à faire appel à la télémédecine en milieu
carcéral dans le cadre sociologique actuel, dès lors que seront
modernisées les procédures des relations du milieu carcéral, ainsi
que cela est souhaitable dans notre monde actuel en changement.
Il est
absolument nécessaire que soit protégée l'identité du patient, sa
personnalité et que les règles déontologiques entre professionnels
de santé s'adaptent aux exigences spécifiques à de telles situations.
La mise
en place de Réseaux de Soins Régionaux gradués et coordonnés grâce
à la Télémédecine contribue à un Aménagement du Territoire, luttant
contre l'éloignement géographique et l'isolement humain dans l'objectif
de donner accès à des soins de qualité pour tous. L'ouverture des
UCSA à ces Réseaux de Soins au niveau d'hôpitaux de proximité allie
la rapidité de la réponse, la sécurité du suivi et la garantie d'une
permanence d'appel, si possible, d'un Réseau Régional dès lors que
l'établissement est loin d'une grande ville.
Comment
ces nouvelles formes d'accès aux soins sont-elles appréciées par
la population carcérale et par les surveillants ?
Un
tel environnement ne peut que contribuer à faciliter le travail
des surveillants et à rassurer la population pénitentiaire quant
aux risques encourus par sa santé. Quant aux professionnels de santé
du milieu carcéral ils sont satisfaits de la suppression de la solitude
qu'ils ressentent.
Existe-t-il
des éléments d'évaluation économique de l'usage de la télémedecine
en milieu pénitentiaire ?
Comme
conséquence habituelle de cette pratique médicale les transferts
peuvent être diminués et lorsqu'ils sont nécessaires leur réalisation
est optimisée.
En accord
avec l'administration pénitentiaire, les surveillants, les professionnels
de santé, il sera bien entendu opportun de réaliser une évaluation
où pourront être abordées simultanément :
- L'analyse
des performances médicales générées, pour le patient, par l'amélioration
de la qualité des soins secondaire à cette nouvelle pratique médicale ;
- L'analyse
des économies générées par la télémédecine, en tenant compte des
économies de moyens validées par les décideurs.
Réagissez
à cet article
Retrouvez tous
les autres articles et interviews de la rubrique Télémédecine.
4
septembre 2002
|