Pr
Patrice Degoulet
Responsable
du projet
Système d'Information à
l'Hôpital Européen Georges Pompidou
(http://www.hbroussais.fr/HEGP)
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L'objectif est donc de mettre en place un dossier
patient multimédia unique, d'accès immédiat et partagé
dès la première année. " |
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20 mai
2000
Suite et fin (2/2)
Quels sont les aspects les plus innovants de ce SI ?
L'objectif est de passer
dune informatique très médico-économique à une informatique
centrée sur les patients et leur dossier. A lHEGP, 80% des
investissements ont été consacrés à linformatique qui touche
au patient : cest un changement important. La France
comble un peu son retard en matière dinformatisation, mais
on natteint pas les niveaux de certains pays européens comme
la Suisse ou la Belgique.
Pour lAssistance
publique, linvestissement qui est fait sur limage est
aussi un investissement important. On a toute une chaîne de production
d'images numériques et la possibilité à terme de communiquer sur
laspect multimédia du dossier patient. Jespère que dautres
hôpitaux vont suivre lAP.
Autre originalité,
on veut permettre de faire de la saisie nomade de paramètres au
lit du patient, en sachant que les expériences ne sont pas toutes
concluantes. Lidée est donc de permettre aux infirmières de
saisir la pancarte avec des tablettes, éventuellement on lespère
à terme de permettre au médecin de signer les ordonnances auprès
des malades, de faire des prescriptions.
Il y a eu une expérience
à Dijon avec le logiciel PENSOIN quon va utiliser. Il y a
eu des problèmes au départ de performances des réseaux parce que
les débits sont inférieurs à ce quon a sur des postes fixes.
Mais les infirmières ont bien accepté le système. On va donc le
mettre en place progressivement. Le système sera connecté par voies
hertziennes. Cest comme un poste fixe sauf que lécran
est un peu plus petit et que les débits sont plus faibles. Cest
un élément de confort, de modernisme mais je ne pense pas que ce
soit la condition du succès. En fait bien peu de services misent
sur ce système de saisie. Dans la plupart des cas, on revient à
son poste de soin, où est rangé le dossier que l'on peut modifier
assis devant un écran dans des conditions confortables de saisie.
Quelle est ladhésion des personnes concernées par lutilisation
de ce SI ? Quels efforts de formation avez-vous dû consentir ?
Linformatique
va concerner la totalité des personnels de soin. On va donc faire
face à des gens qui nont jamais touché un ordinateur. Il ny
en a plus beaucoup, mais cela concerne encore environ 15 à 20 %
du personnel. On est obligé de proposer des formations adaptées
à chaque profession de santé (infirmières, médecins, secrétaires
médicales) et de tenir compte de lantériorité de lexpérience
informatique.
Cest pourquoi,
lon a mis en place une grosse équipe de formation. Il y a
12 formateurs temps plein, 7 salles de formation qui sont
ouvertes en permanence. Le personnel est formé par petit groupe
de 6 ou 7. Toute personne recevra avant darriver à lHEGP
au moins deux jours de formation.
La formation se déroulera
ainsi : une journée théorique, une journée pratique, une équipe
qui fait du coaching et puis après larrivée des patients,
un complément sur le terrain.
L'informatique génère
une crainte chez les professionnels de santé, cest pourquoi
lon déploiera progressivement les logiciels informatiques
sur une période dun an. On a peur que trop de nouveautés tue.
Cela pourrait éventuellement provoquer des mouvements sociaux, des
rejets.
Comment préservez-vous la confidentialité des données médicales ?
Un cadre juridique
existe déjà qui va progressivement sétendre puisque, un jour
prochain, le patient pourra directement accéder à son dossier sans
passer par un intermédiaire. Aujourdhui le patient demande
le dossier au médecin.
Nous avons respecté
ce cadre juridique et là en effet, des allers retours avec la CNIL
ont eu lieu pour suivre parfaitement ses recommandations. Il faut
également ajouter dautres sécurités pour être sûr que nimporte
qui naccède pas à nimporte quoi. Tous les utilisateurs
sont identifiés, authentifiés. Tout le monde aura une carte professionnelle
mais pas dès louverture : au départ, on utilisera des
mots de passe. Tous les postes seront associés à un lecteur de CPS.
Les droits d'accès seront fonction de la catégorie de professionnels.
Certains profils sont dotés de droits respectant des contraintes
de temps (nuit, jour), des contraintes géographiques (unité différente).
Les règles d'habilitation
sont définies par un outil spécifique. On pourra lâcher du lest
ou au contraire renforcer les mesures de sécurité facilement, en
fonction des évolutions.
Comment est identifié le patient ?
Le patient est identifié
par son nom, son prénom, et sa date de naissance.
Pour accéder au dossier,
il faut que quelquun vous ait délégué des droits. Les droits
sont associés à des profils spécifiques (médecin ou infirmière).
Pendant une garde, certains droits sont délégués. Si vous êtes de
garde, cest que vous êtes rattaché à un service qui est le
responsable des gardes. On vous délègue alors certains droits. L'autorisation
se termine une fois que la garde est terminée.
Les dossiers médicaux informatisés pourront-ils être transmis à
lextérieur de lhôpital ? Vers dautres hôpitaux ?
Vers les médecins de ville ? Vers le patient ?
Au sein d'un réseau,
il est naturel que le médecin en ville soit amené à échanger des
données avec lhôpital. La tendance est donc de dire qu'il
faut ouvrir lhôpital à la ville, mais il faut respecter les
contraintes de sécurité. Un réseau de type RSS évite que nimporte
qui puisse intercepter les messages et définit des contraintes de
vérification.
A partir du moment
où le médecin de ville a lautorisation du malade, que le médecin
a sa carte et est identifié comme professionnel de santé, on peut
considérer quil est en droit d'accéder au compte-rendu publié
sur le serveur. On a décidé de ne pas mettre en place cette facilité
pendant la première année, car des soucis de performance vont d'abord
se présenter. Toutefois, il est prévu dans la deuxième phase que
les généralistes puissent se connecter.
En ce qui concerne
laccès par le patient lui-même, je pense que cest quelque
chose quil faut favoriser. Si le patient peut être plus acteur
que spectateur, on peut imaginer que la qualité des soins va s'améliorer,
car il sera plus motivé. Il faut développer des outils informatique
qui permettent au patient de participer à tous les stades des décisions
qui le concernent, donc daccéder à son dossier, voire de participer
à la saisie des informations.
Quelles évolutions envisagez-vous à moyen terme ?
Un réseau interne entre
les hôpitaux de lAP. Aujourdhui, il y a peu de télétransmission
d'éléments de dossier entre hôpitaux. Ca a été lancé pour les gardes
de neurochirurgie, pour envoyer des images, pour décider sil
fallait transférer, mais cest plutôt à développer aujourdhui.
Paris est une ville
énorme. Si on rend accessible la totalité des dossiers de tous les
patients qui sont venus dans au moins un hôpital parisien, on a
la moitié de la France. Je ne suis pas très favorable à des base
de données trop gigantesques. Je pense quil y a un risque
pour lindividu. Il faut être prudent.
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