L'APICEM

Interview du Docteur CARON, médecin généraliste à Dunkerque et Webmestre de l'APICEM

1er octobre 1997
Suite et fin (2/2)

Quelles sont les raisons qui vous ont poussé à mettre en place un Intranet et quels sont ses besoins ?

L’APICEM (Association pour la Promotion de l’Informatique et de la Communication En Médecine) s’est développée autour d’un groupe de médecins locaux. Comme tout groupement fondé sur l’unique proximité géographique, la cohésion entre les différents membres ne va pas de soi. Le ciment qui a permis de développer un véritable esprit de groupe s’est révélé être un Intranet. Il est non seulement l’objectif mais également l’objet du groupe, dont il assure à lui seul la cohésion.

Les raisons qui ont poussé à la mise en place d’un Intranet répondent à un besoin de communication autour de données médicales à l’intérieur du groupe. Ces données et informations, sinon confidentielles, au moins réservées à un public averti, sont accessibles uniquement par un mot de passe.

Pourquoi avoir choisi une architecture Internet plutôt qu’un autre système d’information ?

Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ? Pourquoi réinventer un autre système alors que la technologie Internet est très simple, parfaitement connue et que le réseau est déjà constitué ?

Quel était le système d’organisation existant, et quelle était la demande interne en matière de circulation de l’information et d’organisation ?

Entre les membres du groupe, aucun système performant de circulation de l’information ne permettait un échange efficace des données. La demande en la matière était difficilement quantifiable puisque l’informatisation des médecins est en cours. Cette dernière se réalise, sinon contre leur volonté, au moins avec une grande inertie, et la mise en place d’un Intranet dans ce cadre est l’un des éléments, parce qu’il donne aux médecins du groupe un moyen direct et simple de communiquer entre eux, qui rend cette informatisation acceptable, voire souhaitable.
 

Quelles sont les fonctions et services assignés au système d’information mis en place ?

L’APICEM a centré son offre de services autour de quatre outils principaux :

· Une zone de FMC, où les médecins ont accès au programme des formations médicales proposées dans la région de Dunkerque ;

· Une zone de FTP, qui permet aux médecins le téléchargement de fichiers d’imagerie médicale ainsi que de télé- et de co-diagnostic ;

· Une zone de newsgroups qui offre l’accès à des forums de discussion entre praticiens ;

· Une zone de transfert de courriers, qui correspond à l’échange de données nominatives concernant les patients (système crypté très sécurisé).

Quels sont les différentes parties prenantes au développement de l’Intranet ? Comment s’effectue la coopération entre ces différents protagonistes ?

L’APICEM s’occupe seule du développement de l’Intranet (organisation, contenu). Une collaboration ponctuelle est obtenue auprès du centre d’étude et de recherche en informatique médicale de l’Université de Lille II et d’autres partenariats sont en cours de négociation avec la Communauté Urbaine de Dunkerque, avec le SAMU de Lille pour l’information du grand public, avec les associations régionales de formation médicale continue et enfin avec des établissements de soins locaux.

Quels ont été les problèmes techniques à gérer dans le développement de l’Intranet ?

De nombreux problèmes techniques ont dû être réglés dans le cadre du développement de l’Intranet. Il s’adresse en effet à des médecins dont une grande majorité est peu compétente en informatique. Il a donc fallu créer toute une série d’automates de manière à alléger au maximum la charge d’apprentissage des utilisateurs. Dans la mesure où l’Intranet utilise le réseau Internet, il a en plus fallu prévoir l’utilisation de plusieurs plates-formes différentes (PC, Mac). Actuellement, les développements se font en direction des utilisateurs d’Unix.

Comment la sécurité des informations et des données est-elle assurée ?

La sécurité des informations est organisée de deux manières différentes :

• L’accès à l’Intranet est verrouillé par un système de mots de passe générés par la machine et accordé après avis du Webmestre. Ce système n’est pas d’une fiabilité parfaite, mais les informations qui se trouvent dans l’Intranet n’ont pas un caractère confidentiel assez élevé pour justifier le développement d’un système de sécurisation plus lourd.

• Quant à la circulation des données nominatives qui pourraient concerner des patients, où les préoccupations de sécurité sont ici essentielles, nous utilisons un système de cryptage à double clé dont l’agrément est en cours.
  

Quel bilan coût-bénéfice pouvez-vous faire aujourd’hui du système mis en place ?

Le système étant en cours de développement, un tel bilan n’est pas encore possible.

L’évaluation du système commence à peine, mais l’on peut d’ores et déjà dire que si le bénéfice retiré de l’Intranet est très difficilement évaluable (il s’intègre dans un réseau santé social national, passage obligé des informations), le coût en est extrêmement faible.

La maîtrise d'un outil local, propre aux médecins et sous leur contrôle, mais s'interfaçant avec le réseau national, est avant tout un outil de liberté.

Quelles sont les informations actuellement disponibles sur l’Intranet ?

Les informations disponibles sur l’Intranet sont actuellement réparties en trois groupes :

1 - les pages de formation médicale continue
2 - les fichiers d’imagerie médicale (disponibles en téléchargement ou en examen direct) destinés au télé- et au co-diagnostic ;
3 - la zone des newsgroups où sont publiés au format HTML les messages destinés à l’ensemble du groupe des médecins dunkerquois.

Actuellement une restructuration complète du site Internet est en cours, dont la nouvelle structure devrait être mise en service dans les tous derniers jours de 97.
Cette restructuration devrait coïncider avec le changement du nom de domaine : la multiplicité des apports et des contributions en information est en effet devenue telle que le site et l’Intranet ne sont plus gérables par un seul Webmestre, qui plus est bénévole, mais nécessitent une automatisation à l’extrême des procédures d’alimentation. Par ailleurs, le clonage du site par d'autres associations locales, voire sa régionalisation, seront ainsi rendues possibles.

Quelle est l’évolution envisagée en termes de diffusion et de contenu des informations ?

Des collaborations sont envisagées avec d’autres associations, en particulier de formation médicale continue. La conclusion de tels partenariats devrait entraîner un développement exponentiel des publications diffusées sur le site.

Quel bilan tirer du fonctionnement de l’Intranet à ce jour (réactions internes, extérieures, utilisations, remarques, projets de développement…) ?

Le bilan est actuellement extrêmement favorable et très positif, les réactions négatives sont quasiment inexistantes.

Il s’agit d’une expérience Internet dans un milieu, celui des médecins, qui avait pratiquement ignoré ce média jusqu’à présent. L’Intranet dunkerquois, même s’il s’agit d’un système encore largement perfectible, a eu un écho très favorable dans la mesure où il n’existait que très peu d’éléments de comparaison disponibles dans ce domaine.

Le système a aujourd’hui atteint un degré de maturité supplémentaire et tend vers une professionnalisation plus importante.

Si vous deviez définir le type d’Intranet que vous avez développé, diriez-vous que c’est un Intranet administratif, coopératif ou documentaire ?

Il s’agit d’un Intranet documentaire.

Quelles leçons tirez-vous de la mise en place de ce type de système d’information ?

Le développement de l’Intranet dunkerquois suscite plusieurs réflexions.
La mise en place d’un système d’information réservé à une population de médecins a suscité un très grand intérêt. Cependant, la profession médicale est encore très peu informatisée et à plus forte raison très peu connectée.

Devant les réactions, on peut penser que compte tenu de l’obligation légale pour les médecins de s’informatiser d’ici fin 1998, ce type d’Intranet géré sous forme associative devrait connaître un développement conséquent. Par ailleurs, il semble que dans la région dunkerquoise, le taux de médecins connectés est proportionnellement l’un des plus important de France. Ceci tend à prouver que la mise à disposition des outils suscite une dynamique dans un groupe et que quelques éléments moteurs passionnés sont susceptibles de faire évoluer toute une population de médecins.

Quels sont aujourd’hui les objectifs d’évolution technologique du système ?

Les développements technologiques s’orientent à l’heure actuelle dans deux directions principales :

• La gestion des bases de données à l’intérieur du système Intranet afin de rendre le site interactif. Cette intégration préfigurera la mise en commun d’un certain nombre de données médicales entre les professionnels de santé tel que le prévoit le Réseau Santé Sociale.

• L’utilisation des capacités du langage Java, auquel nous commençons à nous intéresser et qui devrait permettre à terme une interactivité nouvelle à l’intérieur de l’Intranet.
  

1 er octobre 1997