A la suite de cette proposition,
des centaines de réponses ont afflué sur le site du NIH, et d'autres
ont été publiés sur des sites comme celui de The
Scientist, du New
York Times, de Nature
ou du British Medical
Journal.
Certains scientifiques félicitent
Harold Varmus pour son initiative, d'autres sont plus réservés.
Quelques réactions sont franchement critiques, telles celles des
éditeurs de revues scientifiques comme le Dr Kassirer, éditeur du
New
England Journal of Medicine (240 000 abonnés). Les éditeurs
craignent un bouleversement radical de leur activité et des conséquences
fâcheuses pour les sociétés d'éditions. Certains envisagent la disparition
de plus de la moitié des revues biomédicales si le projet aboutissait.
L'idée de la publication d'articles
sur Internet n'est pas nouvelle. Des revues scientifiques de haut
niveau telles que Nature
ou Science
sont déjà accessibles sur le Web, mais l'accès n'est pas gratuit.
Qui voudrait payer un accès en ligne ou un abonnement, si le contenu
était disponible gratuitement sur le site d'E.Biomed ? A cela le
Dr Varmus répond qu'il existe d'autres solutions pour trouver des
financements, et que la société ne doit pas freiner l'accès à la
connaissance de la communauté scientifique.
Cette discussion n'est d'ailleurs
pas réservée au domaine médical. Une bataille similaire s'engage
également autour de la publication des magazines d'actualité, dans
laquelle les partisans du on line se heurtent à ceux, plus
conservateurs, de l'édition papier.
Le Pr Cox, biochimiste à l'université
du Wisconsin, fait partie des détracteurs. "The publication
of an electronic journal, supported by the NIH (
), is among
the very worst ideas I have ever heard".
Certains scientifiques critiquent
la procédure de validation allégée. Ils craignent que la dissémination
d'informations non vérifiées ne jette une certaine confusion dans
l'esprit des chercheurs. D'autres appréhendent, la création d'un
mode de publication "au rabais". Les scientifiques reconnus
ne voudraient pas utiliser cette filière peu valorisante, vers laquelle
se dirigeraient les chercheurs débutants ou ceux dont les travaux
sont discutés.
La mise en ligne d'articles
sur Internet avant publication est déjà couramment pratiquée, notamment
par les physiciens et les mathématiciens, sur le site du Los
Alamos National Laboratory. Mais les détracteurs de la méthode
soulignent que le contexte est différent dans le cas d'articles
médicaux, car leur publication peut avoir des conséquences sur la
santé des patients. L'intérêt du processus de soumission à un comité
d'experts et de révisions successives est d'améliorer la qualité
des articles et de tempérer l'enthousiasme des auteurs, parfois
peu objectifs sur les résultats de leurs travaux.
D'autres scientifiques craignent
une augmentation de l'influence du gouvernement américain sur les
publications scientifiques. Les chercheurs non anglophones sont
déjà amenés à publier en anglais pour que les résultats de leur
travaux soient diffusés au niveau international, mais il existe
des revues scientifiques non américaines de bonne réputation. L'existence
d'un site de référence tel qu'E.Biomed, financé par les pouvoirs
publics américains, donnerait aux Etats Unis un pouvoir d'arbitrage
important sur ce qui doit être publié ou non.