Janvier
2000
Dr
Marc Baillargeat
Co-président du réseau
Alpha Médica
" Les
réseaux constituent une des meilleures façons de pratiquer une médecine
de qualité, tout en défendant la profession. "
La plupart
des réseaux existants sont centrés sur une pathologie ou un problème
de santé publique spécifique, comment est née lidée dun
réseau "généraliste" ?
Lassociation
Alpha Médica a été créée à linitiative de médecins libéraux :
les rencontres entre les membres de lAmicale du XVIIème arrondissement
(association de formation médicale continue) et ceux de Paris Dialogue
entre Praticiens ont permis de formaliser lidée du réseau.
A partir du moment où nous exercions exclusivement en ville, il
paraissait évident dorganiser un réseau poly-pathologies,
pour prendre en charge nos patients dans leur globalité. Notre objectif
est doffrir aux patients une qualité de soins et de prévention
(notamment par léducation) et pas uniquement une meilleure
prise en charge de la pathologie avérée.
Page d'accueil
du réseau
Où en êtes-vous du développement du réseau ?
Alpha Médica est complètement
ouvert. Nous avons créé il y a un mois un statut de membre " associé "
(cotisation de 500 F mais pas de droits dinscription qui se
montent à environ 1700 F). Si les membres associés nont pas
de droit de vote, nous leur donnons ainsi la possibilité de voir
ce qui se passe dans le réseau. Actuellement, 100 professionnels
sont membres (dont la moitié sont des membres " actifs ").
Quasiment toutes les spécialités sont représentées et nous comptons
aussi des kinésithérapeutes, des dentistes, des infirmières et nous
sommes associés aux urgences médicales de Paris. Nous avons instauré
une culture de réseau qui va au-delà du réseau de coopération informel :
notre objectif maintenant est de formaliser les échanges de données,
dinformation et les protocoles de soins. Nous savons dores
et déjà que le principal support sera linformatique et Internet,
nous travaillons à élaborer ces outils.
Quels sont vos projets ?
Avec Axa, nous souhaitons
mettre en place un call-center, disponible à la fois pour les patients
et les médecins dAlpha Médica. Les réponses seront formalisées
par Alpha Médica. Dans un premier temps, la plate-forme sera orientée
sur des questions sociales plus que médicales (une assistante sociale
sera en ligne pour répondre aux questions des patients et des professionnels
de santé : recherche dune maison de retraite, dune
adresse pour la prise en charge dun patient alcoolique par
exemple, etc
). Du point de vue du système dinformation,
nous envisageons deux aspects différents : dune part les aspects
de gestion du réseau et déchanges de données patient et dautre
part, lévaluation, qui implique la mise en place dun
dossier médical partagé entre les membres et le codage des données
quil contient. Nous allons mener une expérimentation du dossier
médical partagé sur le terrain, pour linstant pas "on-line",
dans le cadre dune maison de retraite : un poste dédié
avec un dossier médical partagé sera accessible à tous les médecins
dAlpha Médica qui interviennent dans cet établissement.
Quelle est lutilisation actuelle du système dinformation dAlpha
Médica (site
Web, Intranet) ?
Tous les membres actifs
sont informatisés. Nous communiquons beaucoup par mail mais nous
sommes actuellement limités par limpossibilité déchanger
des données nominatives patient. Comme nous ne pouvions pas dire
à nos membres "choisissez tel logiciel, vous échangerez des
données", nous nous sommes intéressés au dossier médical partagé.
Notre objectif est de mettre en place un système qui fonctionne
sans aucun problème pour que nos membres sy attèlent vraiment.
Quenvisagez-vous pour la formation médicale au sein dAlpha
Médica ?
Nous savons comment
nous allons structurer la FMC
au sein de notre réseau, mais elle nest pas encore en place.
Nous avons pour linstant "protocolisé" des modules
spécifiques, notamment sur la douleur. LInternet est à cet
égard très utile, car les médecins ont très peu de temps à consacrer
à la FMC. Nous proposerons aussi des modules daide à la décision,
directement accessibles en ligne et utilisables lorsque le médecin
est face à son patient.
En quoi consiste votre collaboration avec les urgences médicales
de Paris ?
Les
urgences médicales de Paris gèrent un numéro durgence spécifique
à Alpha Médica, que nous proposons à nos patients sur une petite
carte : les urgences médicales de Paris sont ainsi présentées
comme les urgences dAlpha Médica. Sil y a une difficulté
particulière, les médecins des urgences médicales de Paris nous
appellent ou nous envoient un e-mail. Quand nous aurons le support
technique pour une véritable coordination des soins, les médecins
sollicités pourront avoir accès au dossier patient en ligne dune
part et dautre part renseigner le contenu de lintervention
en urgence. Nous leur avons proposé le statut associé et les responsables
sont membres actifs. Ceci est un exemple de la coopération de deux
réseaux.
Comment
communiquez-vous sur votre réseau ? Comment les patients sont-ils
informés ?
Le réseau nest
pas fait pour "recruter" des patients. Pour nous, les
patients doivent adhérer de manière affective au réseau (sans aucune
implication financière). Nous avons des patients et nous pouvons
leur donner une petite carte présentant le numéro des urgences médicales
de Paris, ladresse du site Alpha medica, le numéro du call-center.
En ce qui concerne ladressage à dautres praticiens,
nous respectons le choix du patient. A terme je pense (et jespère)
que les patients souhaiteront voir des praticiens membres du réseau,
quand nous aurons fait la preuve quAlpha Médica correspond
à une qualité des soins prouvée.
Comment recrutez-vous les professionnels ?
Pour linstant,
nous manquons de temps pour recruter. De plus, actuellement, les
médecins ne se sentent pas menacés et ne sentent pas la nécessité
de "sengager" : même si les média ont déjà
parlé de notre réseau, il est indispensable daller rencontrer
les professionnels pour quils adhèrent. Nous réussissons à
recruter des spécialistes, qui ont un emploi du temps structuré.
Pour les généralistes, cest beaucoup plus compliqué.
Quelles sont pour vous les principales difficultés auxquelles se
heurtent le réseau ?
Le temps et largent,
qui sont des problèmes très liés : nous avons besoin dargent
pour dégager du temps afin de recruter dune part, et afin
de développer des actions concrètes de terrain qui donnent matière
au réseau dautre part. De septembre à juin 1999, nous organisions
deux à trois réunions par semaine après nos heures de consultation :
il faut absolument que nous soyons rémunérés pour cet investissement
en temps. Nous navons aucun financement autre que les cotisations
de nos adhérents. Néanmoins, le récent décret concernant le fonds
daide à la qualité des soins de ville nous offrira peut-être
de nouvelles opportunités.
Comment sinsère le programme Vaccicarte dans le réseau ?
Vaccicarte
est une carte à puce qui gère toutes les informations vaccinales
ainsi que des recommandations de prévention issues des conférences
de consensus : elle indique par exemple la date du prochain
frottis. Elle fait ainsi partie des actions de prévention du réseau
Nous avons commencé à distribuer les cartes à puce. Il faut avoir
un PC et un logiciel de lecture type carte bleue. Environ 6-7 généralistes
du réseau sont équipés de lecteurs. Jai personnellement
distribué 300 volets dinformation sur Vaccicarte à
mes patients : le seul problème, pour évaluer limpact de Vaccicarte,
est quaprès avoir demandé leurs cartes (les patients doivent
renvoyer un volet de demande à la mutuelle qui finance lopération),
il faut du temps pour les voir revenir renseigner cette carte, à
loccasion dune consultation. Lorsque les lecteurs bi-fentes
seront installés dans les cabinets médicaux (FSE
et monétique), le programme Vaccicarte prendra de lampleur.
Dune manière générale, comment dresseriez-vous le bilan actuel
des réseaux de soins ?
De nombreux réseaux
sont encore à létat de projet et ne fonctionnent pas actuellement.
Les réseaux qui sensibilisent le plus les professionnels sont surtout
des réseaux ville-hôpital et souvent des réseaux "sociaux".
Il est maintenant nécessaire que des réseaux polypathologies se
connectent sur ces réseaux monopathologie. Les réseaux constituent
une des meilleures façons de pratiquer une médecine de qualité,
tout en défendant la profession. Cest un excellent relais
entre le praticien libéral isolé, et le syndicat qui est aujourdhui
peu représentatif : les médecins en effet ne se sentent pas
engagés, même si les syndicats sont actuellement les seuls interlocuteurs
des décisionnaires institutionnels. Le réseau correspond de plus
au devoir de tout médecin : chercher à améliorer sa pratique
et à sévaluer. Néanmoins, je pense que pour mettre en lumière
ce que le réseau peut apporter en termes de services, sources de
nouvelles rémunérations pour ses membres et déconomie pour
le système de santé, il faut encore que les besoins des acteurs
du monde de la santé soient précisément quantifiés.
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17 janvier 2000
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