La
DHEA, un vrai-faux médicament
François
Resplandy
20
septembre 2001
Découverte
dans les années 30 dans l’urine humaine, cette molécule naturelle
(déhydroépiandrostérone) est longtemps restée un mystère. Il fut
en effet très difficile de prouver, avant les années 50 et M. Baulieu,
qu’elle était sécrétée par les glandes surrénales (sous forme
sulfatée d’ailleurs) ; difficile dans ces conditions d’envisager
son rôle. Tout est ensuite allé très vite et les résultats obtenus
chez l’animal en particulier sur le vieillissement se sont répandus
comme une traînée de poudre aux Etats-Unis… En 1984, la Food and
Drug Administration interdit la vente de DHEA considérant les risques
de toxicité hépatique. Mais au milieu des années 90, grâce à l’obstination
de quelques-uns, parmi lesquels des médecins, la DHEA finit par
obtenir un statut de supplément alimentaire et est depuis ce jour,
en vente libre aux Etats-Unis.
En
France, la DHEA n’a jamais été en vente libre. Les adversaires de
la DHEA souligne qu’elle peut être considérée comme étant un médicament
puisqu’elle n’a jamais été évaluée comme tel par l’Agence Européenne
des Médicaments (EMEA),
ou par l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de
Santé (AFSSAPS). Elle ne bénéficie
donc d’aucune autorisation de mise sur le marché en France ou dans
l’Union Européenne. Pourtant, si l’on se réfère à la définition
légale du médicament,
la DHEA n’est pas présentée comme ayant des propriétés curatives
mais bien comme restaurant des fonctions organiques affaiblies par
l’âge. C’est donc bien un médicament ; ce qui implique qu’elle
tombe sous le monopole pharmaceutique.
Néanmoins,
elle n’est ni inscrite à la pharmacopée française ni à la pharmacopée
européenne. Il n’existe pas de méthodes reconnues pour l’analyse
du produit et pas de consensus au sujet de son utilisation (indications,
posologie, durée de traitement, etc...). Par ailleurs, même si elle
figure sur la liste
des substances dopantes du ministère de la jeunesse et des sports,
la DHEA n’est pas sur la liste des substances vénéneuses dont l’usage
est interdit en tant que matière première dans les préparations
magistrales (préparations pharmaceutiques formulées par un
médecin et fabriquées à l’officine pour un malade donné sur présentation
d’une ordonnance). La DHEA est donc un médicament et tout le monde
a toujours pu s’en fournir en officine à condition d’avoir une prescription
médicale...
La
disponibilité s’est (trop) ébruitée...
Le
10 avril 2001, Le Parisien claironne que la DHEA est disponible
dans quelques officines bien achalandées. Dès ce moment, les parapluies
commencent à s’ouvrir…
L’Ordre
des Médecins réagit en déconseillant aux médecins la prescription
de DHEA (lire
le communiqué de presse). Coincée par le statut ambiguë de la
molécule, l’AFSSAPS, sachant qu’il n’existe pas de méthode reconnue
et que la mise au point d’une telle méthode n’est pas à la portée
du pharmacien d’officine, précise dans un communiqué
du 3 mai 2001 qu’il est indispensable aux pharmaciens de vérifier
la qualité de la matière première avant son utilisation. Que cela
ne tienne, des laboratoires distributeurs vont développer et valider
des méthodes d’analyse permettant de garantir la qualité de la DHEA
qu’ils fournissent aux pharmaciens. Dans le même temps, Bernard
Kouchner saisit l’AFSSAPS et lui réclame un rapport concernant les
bénéfices et les risques de cette substance. Un groupe d’expert
est alors réuni pour éplucher la littérature scientifique...
Fin
juin, dans l’édito du bulletin du Conseil National de l’Ordre des
Pharmaciens, Jean Parrot déclare "Sachez résister", insistant
sur le fait que le pharmacien est parfaitement "(...) capable
d’apprécier le rapport – bénéfices incertains/risques d’apparition
de cancers hormonodépendants (...) et que sa responsabilité
est donc "totalement engagée".
Le
couperet est tombé
Le
10 juillet, l’AFSSAPS publie le rapport rédigé
par le conseil d’experts : "(...) Il n’a pas
été établi à ce jour une activité pharmacologique directe de la
DHEA. (...) En ce qui concerne l’utilisation de la DHEA dans
la lutte contre le vieillissement, les experts ont considéré que,
dans les études disponibles y compris l'étude DHEAge, les preuves
de son efficacité sont insuffisantes. Les propriétés prêtées à la
DHEA n’ont pas été établies de façon indiscutable et des essais
complémentaires doivent encore être menés. (...) Pour toutes
ces raisons, il ne peut être conseillé de prescrire la DHEA dans
le cadre de la lutte contre les effets du vieillissement, quels
que soient l'âge et le sexe." (lire
le communiqué de presse).
Bref,
et c’est bien légitime, la consommation, la prescription et la délivrance
de DHEA n’a pas la caution des pouvoirs publics et encore moins
celle des organisations professionnelles. Le Conseil National de
l’Ordre des Médecins renchérit dans un communiqué
le 26 juillet. Il recommande "...à nouveau aux consommateurs
éventuels de la D.H.E.A., d'être prudents et aux médecins de ne
pas répondre favorablement aux sollicitations de ces demandeurs.".
D’aucuns
diront que c’est un excès de zèle et que cela n’empêche pas vraiment
la population de passer outre et de se fournir de la DHEA ou tout
du moins d’essayer… La folie et la rumeur en sont à un point tel
que dès 30 ans, certains veulent de la DHEA ! Les leçons du
passé ont parfois du mal à s’imposer quand la jeunesse est en cause...
sauf pour ceux qui n’ont pas envie d’être responsables et encore
moins coupables !
Suite
et fin
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Etude
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Le
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