La
place des usagers dans le système de santé
Dominique
ETIENNE
25
avril 2000
Suite (2/2)
A
la suite des Etats généraux de la santé, un rapport a été commandé
par Lionel Jospin au secrétaire du comité national dorientation
de la Conférence Nationale de Santé, Etienne Caniard.
" La
place des usagers dans le système de santé ", tel est
le titre choisi par le groupe de travail constitué pour répondre
à cette demande, dans le contexte de lélaboration de la loi
sur le droit des patients, annoncée conjointement par le premier
ministre et Martine Aubry. Le rapport ainsi rédigé dresse un état
des lieux de la représentation actuelle des usagers du système de
santé français et y joint des propositions dévolution et dorientation
des structures existantes : ses trois axes sont la structuration
du mouvement associatif, la reconsidération des espaces et instances
de médiation et conciliation entre professionnels de santé et usagers
et enfin lorganisation du débat public sur la santé.
Lorganisation de la représentation
des usagers
La
fonction de médiation et de conciliation
Lorganisation
du débat public et laccès à linformation
Les suites du rapport
Lorganisation
de la représentation des usagers
Les
grandes lignes des orientations nécessaires
Pour
linstant, les usagers ou les intérêts des usagers sont représentés
au sein des structures de décision du système de santé via la désignation
des personnalités qualifiées, qui ont, pour la plupart dentre
elles, des missions dexpertise (comme par exemple au sein
de la récente AFSSAPS).
Lun
des principes les plus importants est de privilégier désormais les
lieux de dialogue pour les usagers de santé plutôt que les lieux
dexpertise. Ainsi, rechercher la participation au processus
de décision ne doit pas se limiter à limplication de
représentants lors des votes mais requiert leur sollicitation en
amont des décisions : lexemple des commissions de travail
de lANAES,
qui ont ainsi inclus des représentants qualifiés pour concevoir
le manuel de laccréditation, est un bon début. Ceci implique
aussi un débat public, sous forme de consultations avant les prises
de décisions de type sanitaire et de santé publique.
Le
bilan des Etats généraux a montré également que la question nétait
pas celle de la définition des droits des patients mais celle de
leur exercice. Ainsi, le développement des droits des patients passe
par la reconnaissance du mouvement associatif et par le développement
des fonctions de vigilance et de conciliation, tant au niveau des
établissements quau niveau régional.
Développer
des lieux de partage de linformation et favoriser la transparence
est la troisième priorité. En citant des exemples dactualité,
dont laccès aux résultats de laccréditation (à moyen
terme), les publications concernant les hôpitaux et leurs performances
ainsi que les données sur les taux dinfections nososocomiales
et les mesures prises à leur encontre dans les établissements, le
rapport plaide pour un espace de discussion sur les conditions de
diffusion de linformation.
Qui
représente les usagers ?
Sur
lexpression d" usager ", plutôt
que celle de " patient " ou encore de " consommateur ",
le rapport cite à bon escient les exemples de représentation et
de défense de trois types dusagers : les familles avec lUnion
Nationale des Associations Familiales (UNAF) et les UDAF (antennes
départementales) ; les associations de consommateurs et lINC ;
les défenseurs de la question de lenvironnement. Le bémol
est que la représentation des usagers de santé ne peut être gérée
de manière aussi " simple ".
Les
associations de santé sont en effet de deux types, qui peuvent parfois
se croiser : les associations de patients (liées à un type
de pathologie précis) et les associations de défense des droits
des malades. Le constat est clair : ces associations sont loin
de représenter lensemble des usagers du système de santé et
dailleurs nen ont pas la vocation. Elle assurent dores
et déjà un rôle de médiation important mais doivent néanmoins bénéficier
dune reconnaissance accrue.
Les
conditions dune représentation efficace
Une
chose est sûre : longtemps, ces structures se sont battues
pour faire reconnaître leur existence et " survivre "
et ne sont pas préoccupées ni de réseau, ni de synergie, ou de coordination
dans leur action. Dune part, la seule structure transversale
existante, le Collectif Interassociatif sur la Santé (CISS) regroupe
20 associations du secteur. Dautre part, lunique action
gouvernementale dans le sens dun développement de lexercice
des droits des patients sest limitée à la définition des commissions
de conciliation au sein des établissements de soins par lordonnance
du 24 avril 1996 (pour les établissements publics) et le décret
du 2 novembre 1998 (pour le secteur privé).
Le
rapport préconise, aussi bien pour les associations que pour les
représentants des usagers en leur sein ou au sein des commissions
de conciliation, un statut reconnu et des moyens via la possiblité
de congés de représentation, à linstar de ce qui existe pour
les organisations syndicales, afin de permettre la participation
des usagers salariés.
La
formation et linformation
En
terme de formation et dinformation, le rapport énonce essentiellement
des recommandations concernant les actions à mener au sein des établissements
de soins. Il préconise la mise à disposition de documents dinformation
préalables aux ordres du jour des réunions au sein des établissements
de soins, pour permettre aux représentants dêtre mieux à-même
de participer efficacement à ces dernières, ainsi que la définition
dun interlocuteur dédié au sein des établissements.
Les
Agence régionales de lHospitalisation (ARH) ont
un rôle central à jouer : celles-ci pourraient être le promoteur
dune réunion annuelle de lensemble des représentants
des usagers au sein des établissements de soins, recenser les recommandations
sur la qualité des relations avec les usagers au sein de ces établissements
et en suivre lapplication. Un compte-rendu de lensemble
pourrait ainsi être exposé lors de la Conférence nationale de santé.
Quant
à la formation, sa mise en uvre effective devrait également
être surveillée par les ARH. La question en suspend est encore celle
de lidentité du formateur. En effet par exemple, dans les
commissions de conciliation, elle est parfois mise en place par
les assureurs eux-mêmes, ce que les associations de patients ne
voient pas dun très bon il. Deux nécessités sont mises
en exergue : dune part, la formation devrait être une
mission obligatoire des associations, clé dun agrément ;
dautre part, il est indispensable quà cet effet, des
moyens financiers soient mis à disposition des associations, ce
qui doit être prévu par la Loi.
Une
structure fédératrice des associations la mise en place dun
agrément des associations
La
rapport préconise la création dune structure nationale commune
des usagers, un Institut de la Consommation, de lEnvironnement
et de la Santé (ou INCES). Celle-ci serait une extension de lactuel
INC et offrirait " une passerelle entre ces trois domaines
essentiels pour la diffusion de linformation et léducation
des concitoyens ". Elle permettrait de rationaliser
et mettre en synergie les moyens mis en uvre dans ces trois
secteurs.
Cette
institut créerait un réseau des associations agréées. Lun
des éléments de reconnaissance des associations de santé est en
effet la création dun agrément spécifique. Le rapport propose
ainsi une série de critères dagrément, à différencier selon
deux niveaux, léchelon local et léchelon national.
Les
associations de santé devraient justifier des éléments suivants :
- une activité
effective et publique ;
- une structure
indépendante de toute organisation médicale ou pharmaceutique ;
- une direction
incluant des usagers indépendants des secteurs médical et pharmaceutique ;
- une " représentativité "
(les critères de représentativité ne pouvant être définis et jugés
quau cas par cas, selon le type de pathologies, de populations
concernées).
Cet
agrément impliquerait lexercice de toutes les missions
jusquici assurées par les associations, avec en sus, la représentation
des usagers dans tous les lieux ou instances comportant des représentants
du système de santé, une participation active à la formation des
personnes appelées à être représentantes, la possibilité de mener
des actions en justice (sachant que celle-ci ne doit pas occulter
la priorité de lexercice du droit individuel des personnes
et de leur accompagnement). Le rapport souligne aussi limportance
de la mise en place dune procédure dappel doffres
public avant toute désignation par ladministration de représentants,
procédant selon un cahier des charges spécifiques, ainsi que lencouragement
par les DRASS de coordinations régionales des associations, qui
répartiraient les crédits attribués aux DRASS pour le fonctionnement
des associations et le développement de la formation.
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