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Mars 2001

 

Freddy BITAN

Responsable du bureau des systèmes d’information
à la Direction générale de la santé


Il faut cesser "d’attendre Godot"

Propos recueillis par Christine Bouchet et Mathieu Ozanam

15 mars 2001

Vous êtes à la tête du Bureau des systèmes d'information au sein de la Sous-direction des politiques de santé et des stratégies, quelle est votre mission ?

Le bureau des systèmes d’information a été mis en place à l’été 2000. Il est le fruit d’une réorganisation globale de la Direction générale de la santé (DGS) visant à recentrer son action sur la santé publique et la sécurité sanitaire, à la rendre plus cohérente et plus efficace.
Avec le développement des NTIC, les systèmes d’information sont d’ores et déjà un élément incontournable du pilotage des politiques de santé. Auparavant, le suivi de ces questions (par exemple le site Internet sante.gouv.fr, l’organisation du comité d’agrément du RSS, le volet de santé de la carte Vitale 2…) était éclaté entre différentes entités au sein de la DGS. Désormais, c’est ce bureau qui est chargé de la mise en cohérence de ces actions ainsi que des projets à développer.
Naturellement, nous ne travaillons pas seuls. Au sein du ministère, nos partenaires sont la direction des hôpitaux et de l’offre de soins (DHOS) et la direction de la sécurité sociale (DSS). Pour le Professeur Lucien Abenhaim, Directeur général de la santé, notre rôle est de concevoir et mettre en œuvre des politiques et programmes de santé publique et de garantir la sécurité sanitaire. C’est un angle de vue qui est souvent différent de l’aspect organisation des soins ou de la régulation budgétaire. Le responsable de la Mission pour l’informatisation du système de santé, Michel Villac (lire son interview) est lui chargé de nous coordonner afin de dégager, sous l’autorité des Ministres, une position ministérielle qui soit une synthèse de celle des trois directions.
Suivant les dossiers, nous travaillons bien évidemment avec les autres partenaires du domaine de la santé, et notamment les caisses d’assurance maladie et les ordres professionnels.
Aujourd’hui mon équipe se compose de neuf personnes dont notamment : un médecin responsable du site Internet, un autre médecin responsable de l’Intranet, un cadre informatique chargé du Comité d’agrément du Réseau santé social, un médecin de santé publique chargé de l’articulation avec l’institut de veille sanitaire (InVS), une personne de l’INSEE en charge des statistiques sur la santé ainsi qu’un chef de projet informatique en charge du volet de santé de Vitale 2.

Pensez-vous vraiment qu’à terme tous les professionnels de santé auront une carte ? Les hospitaliers n’en ont par exemple pas forcément besoin, et de plus le coût de l’achat des lecteurs est très important.

C’est effectivement un argument que l’on entend souvent, mais qui, me semble-t-il, date un peu. Tous les acteurs prennent de plus en plus conscience que les projets Vitale et CPS ont un caractère désormais irréversible. Avec 60 000 médecins télétransmettants, l’adhésion des professionnels ne semble plus faire défaut. Peut être qu’un jour une nouvelle technologie remplacera la carte à puce (la signature bio-métrique peut-être ou une autre encore). Mais faut-il l’attendre pour 2005, 2010, ou 2015 ? La France possède un savoir-faire sur les technologies cartes ; il me semble souhaitable d’en profiter plutôt que « d’attendre Godot » pendant 5 ans. Les instruments qui sont en place ont mis du temps à être acceptés. En conséquence, je ne crois pas que ce soit le moment de reculer. Par ailleurs, le prix des lecteurs de carte, comme celui des autres équipements, devraient continuer de baisser.

Ne faudra-t-il pas prévoir une procédure dégradée d’accès au dossier médical sur le web puisque certains professionnels de santé pourront perdre leur CPS ou ne pas vouloir en être dotés ?

En matière de gestion de dossier de santé sur le Net, il existera de toute façon une offre diversifiée. Certains dossiers seront accessibles par un simple code d’accès côté professionnel de santé comme c’est déjà le cas aujourd’hui. La DGS proposera que les pouvoirs publics puissent éventuellement rendre obligatoire une sécurisation optimale compte tenu des technologies disponibles. Nous souhaitons donc poursuivre le déploiement des cartes CPS notamment au sein des professions paramédicales et du secteur hospitalier, afin d’étendre encore l’authentification incontestable des professionnels et développer la signature électronique qui vient de recevoir valeur légale. En ce qui concerne les patients, la future carte Vitale 2 pourrait comporter trois modalités d’utilisation, selon le degré de protection que les acteurs voudront bien accorder aux différentes informations : la première, « au porteur », sans code ni signature électronique ; la seconde, avec « code PIN » du titulaire, comme sur une carte bancaire, et la troisième avec signature électronique.

A terme, dans le cadre d’un dossier médical géré par un notaire électronique, l’accès du professionnel serait donc géré par la carte CPS et l’accès du patient par la Vitale 2 ?

Compte tenu des instruments impulsés par le Ministère dans le domaine de la santé, c’est une solution sécurisée vers laquelle je penche personnellement aujourd’hui. Pour autant, il existe d’autres modalités de sécurité offertes sur le marché. En outre, il convient de préconiser des solutions transitoires avant la sortie de Vitale 2. Il ne s’agit pas de privilégier un dispositif par rapport à un autre, il s’agit simplement d’exprimer clairement, au regard des lois et règlements en vigueur et des technologies disponibles – celles-ci évoluant très vite -, le degré de sécurité requis pour dématérialiser des données nominatives de santé. C’est la tradition juridique française, expression de la volonté nationale, qui est exigeante sur ce point. La CNIL se montre à juste titre extrêmement regardante en la matière.

Comment feront les patients ? Ils n’ont pas de lecteur de carte chez eux…

De façon schématique, voici comment les choses pourraient se passer : les professionnels de santé disposent d’ores et déjà d’un lecteur de carte. L’exploitation du dossier personnel de santé s’effectuerait le plus souvent chez le professionnel, les droits d’accès lui ayant été accordés par le patient. Celui-ci pourra bien entendu consulter son dossier chez le professionnel de son choix. Par ailleurs, il ne faut pas exclure qu’à l’horizon 2004 (date prévue pour la distribution de masse de la carte Vitale 2), le lecteur de carte soit banalisé sur les ordinateurs personnels. Il est question de claviers dans lesquels, on pourrait introduire dans une fente sa carte Vitale ou une carte bleue pour un paiement en ligne. Ceci à condition bien sûr que la carte Vitale 2 soit conçue en conformité avec les normes internationales; c’est ce à quoi nous travaillons…

Face à la diversité des offres de dossiers de santé en ligne proposées aujourd’hui, quel est votre point de vue ?

A titre personnel, je considère que toutes ces offres sont aujourd’hui dans un état embryonnaire. Néanmoins, la version « coffre fort électronique de santé » me semble personnellement la plus aboutie. Elle est multi-acteurs et multimédia, c’est-à-dire accessible par tous les professionnels de santé, hospitaliers, libéraux, spécialistes ou paramédicaux, selon des droits accordés par le patient. Elle est au standard de l’Internet et utilise donc un protocole que tout le monde peut avoir chez soi avec un simple navigateur ; les patients peuvent y avoir accès. Elle fait en partie abstraction de l’épineux problème des normes grâce à un système de pièces jointes sous la forme de fichiers classiques : Word, Excel, fichiers sons ou images pour les radios, scanners, IRM, échographies, etc…

Vous préconisez donc le dossier sur Internet et non sur le RSS ?

Le sujet reste ouvert. Le moment venu, la DGS fera des recommandations pouvant comporter des dispositions législatives ou réglementaires assurant la confidentialité et la sécurité que les Français sont en droit d’attendre.

La carte Vitale comportera-t-elle des données de santé ou seulement des pointeurs ?

Tout cela va être soumis à concertation dans les semaines qui viennent. L’avènement de l’Internet santé a amené le Ministère à proposer une option « pointeur » (adresse IP d’un dossier de santé sur Internet). Il est proposé de maintenir un contenu médical sur la carte, car c’est dans l’intérêt même des patients désireux de mieux gérer leur dossier de santé. En effet, en 2005, il ne faut pas espérer que plus de 10% ou 20 % de la population soit prête à gérer son dossier de santé en ligne. Par conséquent, si l’on retient l’option « tout pointeur », 80 à 90% de la population serait exclue de fait de ce service.

Cela pose tout de même le problème de la mise à jour des informations…

C’est un sujet techniquement complexe. Toutefois, nous sommes bien conscients qu’en pratique, ce service – l’utilisation des cartes par les professionnels ou les usagers - est et restera facultatif. Si le patient ne vient pas au cabinet avec sa carte Vitale et ne veut pas qu’elle soit mise à jour, que peut-on y faire ? De même, si le médecin refuse d’utiliser la carte, pour des raisons éthiques, déontologiques, par allergie aux outils technologiques ou simplement par manque de temps, rien ne pourra l’y obliger.

En outre, comme c’est souvent le cas dans le domaine des NTIC, c’est parce que l’outil apporte un service à valeur ajoutée aux usagers qu’il se développe rapidement.

Le contenu du volet de santé et les modalités d’accès feront l’objet d’une « concertation prochaine » avec les professionnels, les ordres et les usagers notamment disiez-vous dans le dossier de la MTIC fin octobre. Quelles sont les décisions qui ont été prises ?

Nous allons bientôt faire une présentation de l’état de notre réflexion, et demander l’avis aux acteurs pour compléter notre scénario. Les décisions ne sont donc pas encore prises. Mais si nous voulons distribuer des cartes Vitale 2 dès fin 2003, les contraintes de délais commencent à peser.
Encore une fois, pour les cartes à puce, même si de nouvelles technologies apparaissent, nous ne sommes pas obligés d’abandonner les technologies actuelles du jour au lendemain. Ainsi, si la carte Vitale 2 est diffusée en 2004, elle pourrait très bien être pérennisée quatre à cinq ans par exemple. Bien entendu, nous réfléchissons dès à présent à la prochaine génération d’outils.

Pouvez-vous nous dire quelques mots sur le projet « qualité des sites e-santé »?

La Mission de Michel Villac et la DGS agissent de concert avec le Conseil National de l’Ordre des médecins pour assurer aux usagers que les sites de santé qu’ils fréquentent sont bien ce qu’ils prétendent être et respectent certains principes de qualité, tant en termes de contenus médicaux qu’en termes de services offerts.
Les internautes doivent être informés en toute transparence de la qualité technique et rédactionnelle des sites. Nous réfléchissons à la création d’une association qui serait chargée de la gestion d’un référentiel qualité applicable aux sites e-santé. Le moment venu, le « marquage » issu de cette démarche pourrait, dans le monde virtuel, tenir un rôle comparable à celui de la plaque professionnelle apposée au bas des immeubles dans le monde réel.

Quel est votre site préféré et quelle est votre vision de l’Internet de santé pour demain ?

Cela ne vous étonnera pas si je vous dis que, à mon sens, le site e-santé de référence est celui du ministère (« sante.gouv.fr »)…
L’Internet de santé peut avoir un rôle en terme d’éducation à la santé, de prévention voire de formation continue des professionnels. Il s’adresse à deux publics différents : les professionnels et les usagers. Une partie du chiffre d’affaire des sites pourrait provenir des offres de dossiers de santé en ligne, à condition que ces offres soient de qualité et correctement sécurisées et sous réserve que les patients et/ou les professionnels soient prêts à payer pour ce type de service, ce qui reste à vérifier. A terme, il pourrait y avoir un nombre significatif de personnes prêt à investir 100 ou 200 Francs par an dans ce type de services au vu des avantages procurés en termes de suivi de soins, par exemple pour les personnes atteintes de maladies chroniques ou rares. C’est pour ces raisons et à ces conditions que je pense qu’un marché du dossier de santé sur Internet pourrait se développer.



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