Janvier
2000
Maurice
Gallix
Président de Depolabo
Propos
recueillis par Christine
Bouchet
11
janvier 2000
"Les
différences entre Etats-Unis et France (...) ont permis la création
de pharmacies électroniques aux Etats-Unis. En France, la législation
plus contraignante ne le permet pas à l'heure actuelle. Mais avec
la pression conjuguée au développement de l'U.E. tout peut être
envisagé"
Les pharmacies électroniques connaissent
un grand succès aux Etats-Unis, et font leur apparition en Europe.
Pensez-vous que cette évolution soit envisageable en France ? A
quelle échéance ?
Les
différences entre Etats-Unis et France, dans l'exercice de la pharmacie,
ont permis la création de pharmacies électroniques aux Etats-Unis.
En France, la législation plus contraignante ne le permet pas à
l'heure actuelle. Mais avec la pression conjuguée au développement
de l'Union européenne, tout peut être envisagé mais il est très
difficile de donner une échéance car le problème est politique.
On ne peut en même temps vouloir un réseau de 24.000 pharmacies
capables de fournir dans les délais les plus rapides le médicament
désiré à tous les malades dans n'importe quel point du territoire
et laisser se développer une forme de dispensation nouvelle mettant
en péril économique ce réseau voulu par les politiques (voir le
nombre de députés et de sénateurs, maires d'une commune
).
Si les pharmaciens français ne se positionnent pas sur le marché
du commerce électronique, ils risquent d'être pris de court par
un nouvel entrant, comme cela semble se passer au Royaume-Uni avec
Pharmacy2U. N'ont-ils pas intérêt à anticiper le mouvement et à
se regrouper pour le positionner sur ce marché ?
Les
pharmaciens français sont aussi capables, a priori, de se positionner
que les britanniques. Mais là aussi, il faut tenir compte des différences
fondamentales de législation entre les pays concernés.
Pharmacy2U
vient de démarrer et il n'est pas question que les autres pharmaciens
britanniques restent inertes. Nous ne savons pas à l'heure actuelle
comment ils vont réagir.
Jusqu'à aujourd'hui les groupements de pharmaciens en France ont
été créés pour obtenir de meilleures conditions d'achat auprès des
fournisseurs sans en faire bénéficier pour autant les acheteurs.
Je ne pense pas que les pharmaciens français soient prêts à se regrouper
pour se positionner sur ce marché car là encore la législation actuelle
ne permet pas de réaliser les regroupements.
Pensez-vous que le commerce électronique de
médicaments permettrait de diminuer les coûts de distribution ?
De
quoi parle-t-on quand on parle de distribution ? Est-ce de la distribution
de masse comme la réalisent les supermarchés ou est-ce la distribution
sur mesure comme la réalisent les pharmaciens d'officine ? Ou est-ce
la distribution par correspondance type la Redoute ou les 3 Suisses
?
Il est facile de dire que la distribution du médicament coûte cher
en la comparant à la distribution des pâtes ou des aliments pour
chiens, mais quand on la compare au coût de la distribution des
eaux minérales, cela devient moins évident. Car dans toute distribution
il y a une valeur ajoutée difficilement chiffrable. Quand on voit
le coût total de la distribution aux USA, les gains possibles en
France ne me paraissent pas évidents.
Selon vous, quel serait le meilleur modèle de distribution envisageable
dans le cadre de la vente de médicaments on line : système des store
locators, ou portage à domicile ?
Les
deux peuvent et doivent cohabiter. Comment peut-on envisager un
même système pour un parisien habitant le 16e arrondissement
et une personne du troisième âge habitant un village reculé de la
Corse ou du Limousin ? Comme toujours le bon sens l'emportera et
les deux systèmes cohabiteront ! Faut-il, là aussi, que la réglementation
le permette.
Le développement de la vente en ligne
de médicaments et de produits pharmaceutiques implique-t-il un changement
de métier pour les dépositaires ?
Le
dépositaire est par sa définition même un prestataire de services.
Ce qui veut dire que pour ne pas mourir et prospérer, il doit être
en permanence:
- adaptable,
- flexible,
- pragmatique,
tout en sachant rester à sa place. Le développement en ligne de
médicaments est parfaitement réalisable par un véritable dépositaire,
mais faut-il que les industriels du médicament le désirent et que
les pouvoirs publics le permettent.
Vous avez déjà l'expérience de la vente en ligne aux professionnels.
Cette nouvelle méthode a-t-elle apporté des améliorations ? A-t-elle
été rapidement adoptée et bien acceptée par les professionnels ?
Depuis
plus de 40 ans, nous pratiquons la vente en ligne aux professionnels
qui dans notre jargon s'appelle la vente directe. Si cette méthode
n'apportait aucune amélioration ou n'avait aucun intérêt, elle aurait,
comme les dinosaures, disparue. Or elle existe, et même mieux, le
lobby des grossistes répartiteurs n'a de cesse que de la voir supprimée.
Mais, malgré ce lobby et l'instauration d'une taxe début 1998, les
pharmaciens continuent à utiliser ce mode d'approvisionnement.
Pensez-vous que l'Internet permettra d'intégrer différents
types de service aux patients comme le portage à domicile de médicaments,
le maintien à domicile ?
Internet
n'est qu'un outil supplémentaire de communication mis à la disposition
du public. Il ne faut pas en faire le gourou capable de régler tous
les problèmes et d'apporter le bonheur à l'humanité souffrante.
Mais il est certain que bien utilisé et bien compris, il doit permettre
de développer à moindre coût toute une série de services facilitant
la vie des malades en particulier.
C'est l'outil indispensable pour le développement des réseaux et
il faut savoir que déjà des expériences existent et malgré l'inertie
et le conservatisme de beaucoup, ces expériences deviendront un
des maillons indispensables du système de santé de demain.
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10 janvier 2000
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