Mai
2000
Claude
Malhuret
Président de
Doctissimo
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Doctissimo n'a pas pour objectif de se substituer
aux médecins, bien au contraire. Toutefois, il est
certain que l'Internet, en santé comme ailleurs,
va redistribuer profondément les rôles et les fonctions
de chacun des acteurs (...)" |
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30
mai 2000
Président
et Directeur de Médecins sans Frontières de 1978 à 1986, Ministre
des Droits de lHomme de 1986 à 1988, Claude
Malhuret a rejoint Medcost en 1998 pour prendre en charge la
politique marketing et de communication de lentreprise. Associé
aux travaux de lAtelier
Paribas dès sa création, sa passion pour le développement de
lInternet la conduit à lancer le portail santé grand
public Doctissimo.
Pouvez-vous nous dire
ce qui vous a donné l'idée de créer un site santé grand public en
France ? Combien de temps cette idée a-t-elle mûri, et comment
est finalement né Doctissimo ?
L'Internet
est pour les français, et pour les européens en général, une leçon
d'humilité. Il faut bien reconnaître que dans ce domaine, et c'est
encore plus vrai en santé qu'ailleurs, les exemples américains se
sont imposés avec plusieurs années d'avance.
Doctissimo.fr
C'est
une fréquentation intensive des grands portails santé aux Etats-Unis,
nés en 1995 et 1996, qui m'a fait découvrir leur qualité exceptionnelle.
Cette qualité semble appréciée des consommateurs de soins dans ce
pays, puisqu'en 1999, sur 90 millions d'internautes, 60 millions
sont allés chercher sur ces portails des réponses à leurs questions
santé. Il n'y avait rien de plus tentant, pour le médecin que je
suis, que d'acclimater l'expérience en France et de vérifier si
elle rencontrerait le même succès. L'idée m'a paru tellement séduisante
qu'elle n'a pratiquement pas pris de temps pour mûrir.
En
revanche, j'ai hésité assez longuement sur le positionnement d'un
tel site. Après avoir envisagé une cible de professionnels de santé,
à l'image de l'excellent Medscape.com,
je me suis aperçu que la clientèle professionnelle était encore
trop restreinte en France et que le vrai créneau, comme le vrai
besoin, se situait auprès du grand public. C'est donc dans cette
direction que j'ai choisi le positionnement du site, de son contenu,
de son arborescence. Et si l'idée n'a pas pris de temps pour mûrir,
par contre cette conception fut un travail beaucoup plus long et
difficile que je ne l'imaginais : il m'a fallu analyser pendant
plusieurs mois les grands portails santé américains, isoler ce que
chacun apportait de meilleur et enfin en faire la synthèse.
Le
plus délicat fut sans doute l'élaboration de l'arborescence :
s'il est un domaine où chacun s'accorde à trouver dans Doctissimo
une qualité particulière, c'est sans aucun doute celui de la facilité
de navigation et de simplicité de l'arborescence. Bien entendu cette
simplicité n'est telle que pour l'internaute et correspond au contraire
à une grande complexité dans sa réalisation, au point qu'il m'est
parfois arrivé de me décourager lors de sa conception. Je crois
que c'est Charles Dickens qui disait qu'écrire court lui prenait
un temps infini...
J'ai
ensuite soumis le projet à Laurent
Alexandre et Cédric
Tournay, avec lesquels je travaillais depuis deux ans à Medcost
et dont je connaissais toute l'expérience accumulée dans le domaine
de l'Internet médical, du développement de sites Web, de la connaissance
de l'ensemble des acteurs de la chaîne de soins et de la création
de valeur ajoutée en santé.
Enfin
la confiance des dirigeants de Fonds Partenaires Gestion, l'un des
principaux fonds de capital risque de Lazard, nous a permis de réaliser
le tour de table nécessaire pour construire le site, pour le faire
vivre jusqu'à ce qu'il trouve son équilibre financier et pour assurer
sa promotion, condition sine qua non d'une réussite sur Internet.
Les premières statistiques de consultation du site sont
largement supérieures aux prévisions. Quels enseignements en tirez-vous ?
La
question essentielle qui se posait était la suivante : le succès
des portails santé grand public serait il reproductible en France ?
La réponse n'allait pas de soi. On pouvait penser en effet que ce
succès était du outre-Atlantique à la véritable défiance actuelle
des patients face au système de soins, défiance qui n'existe pas
dans notre pays où nos concitoyens sont très majoritairement satisfaits
de leurs rapports avec les professionnels de santé.
Nous
avons néanmoins fait le pari que le besoin d'information, de compréhension,
de prise en charge de sa santé était aujourd'hui universel. Il semble
bien que nous ayons eu raison : nous avions fixé prudemment l'objectif
de notre business plan à un million de pages vues mensuelles à la
fin de l'année 2000. Au bout de quinze jours d'existence nous en
étions à 150 000 pages vues par jour, soit une tendance
de près de 5 millions par mois. Ce résultat se situe bien au-delà
de nos espérances. Mais la prudence continue de s'imposer :
seul le temps nous permettra de dire s'il s'agit d'un succès d'estime
ou s'il sera durable, même si le maintien de l'audience alors que
la publicité commence à diminuer fortement nous rend optimistes.
Mais
au-delà des chiffres, le principal enseignement que nous tirons
du début de l'expérience est la soif impressionnante de connaissances
en santé de la part du public : en 15 jours plus de 5000 personnes
se sont abonnées à notre newsletter et le rythme ne faiblit pas,
nous enregistrons plus de 150 questions quotidiennes aux experts
et pratiquement autant d'inscriptions au club Doctissimo.
Comment voyez-vous l'évolution de l'Internet médical ?
Pensez-vous que la mise à disposition d'informations de santé pour
le grand public peut modifier la relation médecin-malade, et faire
évoluer le système de santé ?
Doctissimo
n'a pas pour objectif de se substituer aux médecins, bien au contraire.
Toutefois, il est certain que l'Internet, en santé comme ailleurs,
va redistribuer profondément les rôles et les fonctions de chacun
des acteurs, qu'ils soient professionnels de santé, producteurs
de médicaments ou de matériel, distributeurs ou consommateurs de
soins. Il convient donc de s'y préparer et d'essayer d'appréhender
au mieux le paysage en train de naître sous nos yeux.
D'ici
quelques années l'Internet aura modifié ce paysage dans le domaine
que nous appelons celui des "trois grands C" : Contenu,
Commerce, Connectique. Contenu, parce que, aussi bien pour les professionnels
que pour le grand public, l'Internet va permettre une très large
diffusion des connaissances, une amélioration de la formation, de
l'information, de la prévention. Commerce parce que, en santé comme
ailleurs, l'Internet va transformer les étapes de la chaîne de valeur
de la distribution, probablement plus fortement d'ailleurs entre
professionnels qu'entre les professionnels et le grand public. Connectique
enfin, et c'est sans doute là l'essentiel, parce que tous les acteurs
du système de soins : patients, médecins, hôpitaux, laboratoires,
pharmacies, etc. seront bientôt connectés grâce à l'Internet et
que cela modifiera profondément leurs rapports - la gestion du dossier
médical ou l'essor de la domotique médicale étant les deux premiers
exemples qui viennent à l'esprit.
Comment
voyez-vous Doctissimo dans deux ans ?
C'est
une question délicate, car faire des prévisions à deux ans en ce
qui concerne l'évolution de l'Internet me paraît terriblement arrogant.
Je ne crois pas que quiconque puisse le faire aujourd'hui sans s'exposer
à être cruellement démenti le jour venu par les faits, notamment
par la rapidité effrénée des nouveautés et du développement permanent
des applications. On peut néanmoins risquer une hypothèse assez
probable : dans deux ans les portails santé qui auront réussi
et subsisteront (il n'y en aura pas plus de deux ou trois en France)
seront ceux qui auront répondu aux défis suivants :
-
Devenir
suffisamment familiers pour faire partie du paysage et avoir
obtenu une audience nombreuse et fidèle.
-
Avoir
réussi le partenariat (ou l'alliance, ou la fusion) avec d'autres
producteurs de contenu pour le grand public (grands opérateurs,
chaînes de télévision par exemple).
-
Avoir
enfin réussi, par croissance, acquisitions ou alliances, à se
positionner sur l'ensemble de l'espace des trois C dont je parlais
précédemment. D'où l'énorme intérêt de la proximité entre Medcost
et Doctissimo,
qui confère d'emblée à ces deux partenaires une place simultanée
auprès du grand public comme au sein du monde des professionnels
de la santé.
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30
mai 2000
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Etude
de cas
www.doctissimo.fr
Le
portail de référence pour le grand public
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