20
euros, et après ?
Hervé
Nabarette et Mathieu
Ozanam
12
juillet 2002
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Le
5 juin, les médecins libéraux ont obtenu gain de cause sur leur
principale revendication : la revalorisation du tarif de la
consultation des généralistes à 20 euros. Cet accord soulève des
interrogations sur le respect de l’obligation faite aux médecins
de prescrire en échange plus de génériques et sur le déséquilibre
accru des comptes de la sécurité sociale qui s’annonce. Il pose
avec plus d’acuité la question de la réforme qualitative de la rémunération
des médecins libéraux.
Une
hausse importante du tarif de la consultation sous influence du
gouvernement
L’accord
a mis fin à un conflit débuté en novembre 2001, qui s’était traduit
par une grève des gardes et plusieurs journées "santé morte".
Il a été signé entre les caisses d’assurance maladie et les syndicats
de médecins : la Confédération des Syndicats Médicaux Français
(CSMF), le Syndicat des Médecins Libéraux (SML), MG France, et la
coordination des médecins libéraux, avec une ratification par les
assemblées générales dans ce dernier cas.
Le
tarif conventionnel de la consultation passe à 20 €uros, soit une
hausse de 17 %, effective au 1er juillet 2002. Par
ailleurs, la visite à 30 €uros sera mise en place en octobre
2002, après signature d’un accord de bon usage. Le tarif est déjà
applicable dans certains cas pour les visites aux personnes âgées
dépendantes. L’accord prévoit aussi l’arrêt des procédures engagées
contre les médecins ayant pratiqué la consultation à 20 €uros
avant l’accord. En contrepartie, les médecins prennent un engagement
de "bonnes pratiques" : prescrire les médicaments
en molécules ou génériques. Et les syndicats de médecins arrêtent
leurs grèves. Au passage, on remarquera le poids du politique sur
le système conventionnel, puisque c’est la nouvelle majorité qui
a "fait en sorte" que l’accord soit signé.
L’obligation
des médecins de prescrire des génériques
Tous
les médecins s’engagent conventionnellement à établir leurs prescriptions
en dénomination commune internationale. Dans un premier temps, cet
engagement porte sur 25 % en moyenne nationale des lignes de
prescriptions médicamenteuses dont la moitié au moins entre dans
le champ du répertoire des génériques. Apparus
en 1996 dans le code de Santé publique, les génériques ont jusqu’ici
eu du mal à s’imposer. En France, ils représentaient 3,1 %
des médicaments remboursés en 2001, avec des différences variant
de un à trois, en fonction des départements et des officines plus
ou moins impliquées. La moyenne européenne s’établit quant à elle
autour de 15 %, et atteint près de 40 % en Allemagne et
aux Etats-Unis. Les causes de ce mauvais résultat sont connues :
"effet marque" côté patient, sourde hostilité de certains
médecins peu désireux d’ "obéir" aux caisses ou de
laisser trop de "pouvoir" aux pharmaciens dans leur substitution,
champ de la substitution possible encore limité. Le répertoire des
génériques publié par l’Agence française de sécurité sanitaire des
produits de santé (AFSSAPS) recouvrait en 2000 à peine 14 %
du marché total du médicament remboursable. Avec la chute dans le
domaine public de nombreux médicaments vedettes (dont le Prozac),
ce répertoire grossit. En mai 2002, le SNIP souligne un décollage
"sur les 18 derniers mois". Les génériques sont passé
de 3 % à 7 % du marché en unités et de 2 % à 4 %
en valeur. Avant l’accord, le Syndicat prévoyait un doublement de
ces chiffres d'ici à deux ans, en raison du montant que représentent
les médicaments qui vont tomber dans le domaine public : "1
milliard d' €uros de chiffres d'affaires".
Ce
mouvement structurel aidera les médecins à respecter leur obligation.
Toutefois, la nature exacte de leur engagement pose problème :
à la demande des syndicats, aucune sanction individuelle ou collective
n’a été prévue en cas de non-respect des engagements de prescription.
Les partenaires sociaux ont alors beau jeu de souligner les contradictions
des médecins qui réclament la "maîtrise médicalisée" mais
refusent tout engagement contraignant. Ils annoncent une surveillance
scrupuleuse du suivi de l’accord.
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