5000
maladies rares :
le choc de la génétique
L'ouverture des
parapluies - Tableau de Bruno
Schiepan
Mathieu
Ozanam
19 novembre
2001
L'existence
du Téléthon
qui aura lieu cette année les 7 et 8 décembre, comme
depuis bientôt 15 ans et les progrès dans le décryptage
du génome humain ont beaucoup concouru à la prise
de conscience par le grand public du problème des maladies
rares. Mucoviscidose, myopathie et maladie des os de verre sont
les plus connus de ces pathologies qui touchent moins d'une personne
sur 2000, concernent près de 4 millions de Français
et 24 millions d'européens selon le rapport du Conseil Economique
et Social. 80% d'entre elles sont génétiques, mais
on dénombre également des maladies infectieuses très
rares, ainsi que des maladies auto-immunes. La littérature
médicale en décrit 5 nouvelles chaque semaine.
L'inauguration
par Bernard Kouchner d'une "plate-forme dédiée
aux maladies rares" à l'hôpital Broussais de Paris
marque un pas important dans la prise en charge des patients et
familles atteintes par l'une des 5000 maladies rares recensées
en France. Ce centre d'accueil, d'information et d'écoute
rassemble quatre acteurs : le collectif d'associations Alliance
maladies rares, le réseau européen d'associations
Eurodis, le site Internet Orphanet et Allo-Gènes (avec un
numéro Azur : 0.810.63.19.20). Le public aura à sa
disposition des salles de réunion, des bureaux et des moyens
logistiques.
Il reflète l'importance accordée aux maladies rares.
Les sommes qui leur sont allouées en France sont comparables
à celles consacrées aux cancers ou aux maladies cardio-vasculaires,
avec près de 17 milliards d'Euros en 1997, soit 15% des dépenses
totales de santé. Les personnes atteintes génèrent
des dépenses que l'on estime 3 à 4 fois supérieures
à la moyenne, qui est de 12 000 francs par Français.
Pourtant
Bernard Barataud, l'ancien président de l'Association
Française contre les Myopathies (AFM) dresse un constat
moins optimiste dans son rapport intitulé 5000
maladies rares, le choc de la génétique présenté
début octobre au Conseil Economique et Social.
L'errance
diagnostique
La
difficulté pour les professionnels de poser un diagnostic
exact rapidement entraîne une perte de temps, d'énergie,
et une consommation de soins et de médicaments qui, outre
leur coût économique, représente des risques
potentiels pour les malades et une perte de chance due aux retards
accumulés. D'après une étude du Centre de recherche
et d'étude en économie et gestion de la santé
(CREGAS) réalisée auprès de 532 malades, seuls
5,2% d'entre eux avaient bénéficié d'un diagnostic
immédiat. 40,6% avaient eu entre 2 et 5 contacts avant le
verdict, et 15,3% enter 6 et 9 contacts. La trajectoire moyenne
durait 2 ans et 8 mois. Même si cette étude ne prétend
pas être représentative de toutes les maladies rares,
elle met en évidence l'expérience de ces personnes
et de leurs familles qui, ballottées au gré des consultations
vivent dans l'angoisse.
Que dire des incompréhensions du corps médical ?
"J'étais si fatigué et depuis si longtemps que
ma femme m'a décidé à prendre rendez-vous avec
un éminent interniste d'un grand hôpital parisien.
Il m'a examiné. Il m'a découvert un foie très
volumineux. Il m'a dit : "vous buvez". j'ai répondu
"non". il m'a dit "vous mentez !". Il s'est
avéré qu'il s'agissait en réalité d'un
hémochromatose, une maladie due à la saturation du
corps en fer qui se traduit par un foie volumineux, une peau terreuse
et pigmentée de gris.
Autre expression de cette erreur de diagnostic l'internement psychiatrique,
telle cette personne atteinte de myasthénie qui a passé
huit ans en hôpital psychiatrique. Enfin, souligne Bernard
Barataud, les couples ignorants les causes de leur mal donnent naissance
à des enfants qui seront peut-être porteurs eux aussi
de handicaps majeurs.
Plaidoyer
pour un travail en réseau
S'il
est impossible aux futurs médecins d'étudier 5000
maladies rares, il faudrait enseigner une "pédagogie
du doute" et améliorer la formation au raisonnement
et à la vigilance propose l'ancien président de l'AFM.
La rareté des maladies engendre la rareté des informations
disponibles à leur sujet. La France souffre à cet
égard d'un manque d'études épidémiologiques.
Le rapport regrette également l'individualisme du corps médical
qui renforce l'isolement des médecins face à des maladies
qu'ils auront rarement l'occasion de rencontrer au cours de leur
carrière. Un médecin de ville aura par exemple des
difficultés à savoir ce que son patient est devenu
après qu'il l'aura adressé à un hôpital.
Du côté de l'assurance maladie, la prise en charge
des soins des personnes atteintes par est "insuffisante ou
inadaptée". Le rapport souhaiterait une meilleure réactivité
qui pourrait se traduire par une homogénéisation des
pratiques et une simplification des règles, par exemple pour
la prise en charge des frais de déplacements vers un hôpital
hors du secteur du malade. L'assurance maladie
Le
rapport porté par les représentants de la société
civile qui siègent au CES, sans proposer des solutions toutes
faites, souhaite se faire entendre des pouvoirs publics, manifester
son soutien aux associations de patients et aux malades et contribuer
à une meilleure connaissance non seulement des maladies,
mais aussi des problèmes pratiques rencontrés par
les malades.
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