10% des médicaments achetés sans prescription.
Corinne
RADAL
15 mai 2001
En 1999, la consommation de médicaments non prescrits a représenté
10% de l'ensemble de la consommation pharmaceutique française,
soit 13 milliards de francs. Cette proportion n'a pas cessé
de baisser depuis les années 1960, où elle était
de 50%. Le développement de l'Assurance Maladie, l'augmentation
du nombre de médecins et celle du recours aux soins des Français
en général ont contribué à ce phénomène.
Qui achète des médicaments sans ordonnance ?
L'achat
de médicaments sans ordonnance est aujourd'hui une pratique
courante en France, puisque 75% des Français y ont recours.
Les femmes sont les plus grandes consommatrices de médicaments
non prescrits, loin devant les hommes qui dépensent environ
deux fois moins dans ce domaine. Néanmoins, cette donnée
doit être nuancée par la fait que ce sont souvent les
femmes qui achètent des médicaments pour d'autres
membres de la famille. On observe également une augmentation
de la consommation de médicaments obtenus sans ordonnance
avec l'âge. Cette tendance s'inverse chez les personnes très
âgées, qui suivent souvent plusieurs traitements en
même temps et doivent donc faire particulièrement attention
aux interactions médicamenteuses.
Enfin, il apparaît que la consommation de médicaments
non prescrits augmente selon la CSP, le niveau de diplôme
et le revenu. Ces trois variables ont ici une influence importante,
alors qu'elles n'interviennent que très peu dans la consommation
de médicaments prescrits. Ce résultat provient non
seulement d'un aspect financier (les médicaments obtenus
sans ordonnance ne sont pas pris en charge par la Sécurité
Sociale), mais également de différences en termes
d'éducation et de prévention.
Pour
soigner quoi ?
15
classes thérapeutiques (sur 219 comprenant des médicaments
à prescription facultative) regroupent plus de 50% du chiffre
d'affaires des médicaments non prescrits.
Le recours à l'automédication concerne en effet essentiellement
le traitement de maux courants tels que :
- les douleurs et la fièvre (analgésiques et antipyrétiques)
- le rhume et la toux (décongestionnants, antitussifs
...)
- les problèmes digestifs (antiacides et laxatifs)
- les contusions et les plaies (antiseptiques, désinfectants,
cicatrisants
)
- la fatigue et l'état général (vitamines,
minéraux, toniques ..).
Qu'en
est-il au niveau européen ?
En
1999, la consommation de médicaments sans prescription en
Europe s'est élevée à 81 milliards de Francs,
soit 12,5% de l'ensemble du marché pharmaceutique européen.
Cette moyenne cache bien entendu de grandes disparités entre
les pays, compte tenu des différences entre les systèmes
de soins, les marchés du médicament et les mentalités.(voir
le graphique)
La France se situe en-dessous de la moyenne européenne, avec
seulement 10% de médicaments non prescrits au sein de la
consommation totale de médicaments en 1999.
De
plus, la consommation française de médicaments non
prescrits représente seulement un tiers de la consommation
de médicaments à prescription facultative, ce qui
est peu par rapport aux autres pays d'Europe. En effet, le groupe
des médicaments à prescription facultative comprend
en France des médicaments pris en charge par la Sécurité
Sociale quand ils sont prescrits et d'autres qui ne sont jamais
remboursés.
L'existence de cette "possibilité de remboursement"
influe sur la consommation de produits sans ordonnance. En effet,
il apparaît que seulement 11% des médicaments qui sont
remboursés quand ils sont prescrits sont achetés sans
ordonnance, alors que c'est le cas de 87% des produits non remboursables.
Source
: La consommation de médicaments non prescrits. Etude de
la DREES n°105. Mars 2001.
Cette possibilité de remboursement joue à 2 niveaux.
D'une part, quand un médicament est remboursable, les Français
ont plus tendance à se le faire prescrire de manière
à être pris en charge par l'Assurance maladie. D'autre
part, dans la mesure où la publicité est interdite
pour les médicaments remboursables, que la prescription soit
obligatoire ou non, le grand public connaît mal ces produits
et ne les achète donc qu'à l'initiative de son médecin.
Bien
que la part des médicaments non prescrits dans la consommation
pharmaceutique française soit relativement restreinte, elle
représente quand même 13 milliards de francs, ce qui
en fait un segment du marché non négligeable dans
le contexte actuel de maîtrise des dépenses de santé.
De plus, il est possible que ces médicaments prennent une
importance croissante dans le système de soins, avec d'une
part l'augmentation de l'information et de l'éducation des
patients, notamment via les sites Internet consacrés à
la santé, et d'autre part la tendance actuelle des laboratoires
pharmaceutiques à faire passer certains de leurs produits
en OTC.
L'Ordre
des médecins, qui a consacré en février dernier
un rapport à l'automédication, a choisi de prendre
les devants, et réfléchit actuellement à l'élaboration
d'une charte sur ce thème à destination des patients,
des médecins et des pharmaciens.
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