Les
guidelines en pharmacoéconomie
Comparaisons
institutionnelles
Situations actuelles et perspectives
Florence
Baron
Dominique
ETIENNE
31 mai
2000
Les systèmes de santé
qui coexistent en Europe impliquent des réglementations en matière
de santé aussi différents. Néanmoins, si chaque pays possède son
propre processus décisionnel, on retrouve partout le fait que deux
autorités séparées sont responsables du remboursement et de la fixation
des prix des produits pharmaceutiques.
Dans la majorité des
pays, le prix est fixé au niveau national (système de " prix
administrés "). Les Pays-Bas, la Grande-Bretagne ou lAllemagne,
possèdent des systèmes de prix " libres ", qui
diffèrent les uns des autres, la règle au sein du NHS étant de rembourser
intégralement un produit à partir du moment où il a été commercialisé,
et les Pays Bas et lAllemagne fixant les prix des nouveaux
médicaments de manière indirecte sur la base dun prix de référence
pour une grande classe thérapeutique ou une indication.
De manière générale,
la phase de négociation de prix ne sappuie pas sur de véritables
études pharmacoéconomiques mais sur des évaluations économiques
(rapport coût-efficacité réelle). Celles-ci ont plus dimpact
sur les décisions de remboursement que sur la fixation du prix :
les études pharmacoéconomiques prennent à cet égard de plus en plus
dimportance en Finlande, aux Pays-Bas, Italie, Portugal, Norvège,
et au Danemark notamment.
Lévaluation économique
a eu plus de prise à léchelon local, pour une inscription
dun médicament sur un formulaire hospitalier, ou pour ladoption
dune nouvelle prescription par un groupe de praticiens donné
mais lélaboration de guidelines au niveau national qui dépassent
le seul critère defficacité thérapeutique prend de lampleur.
LAllemagne
La Belgique
Le Danemark
LEspagne
La Finlande
La France
La Grande-Bretagne
LItalie
Les Pays-Bas
Le Portugal
La Norvège
LAllemagne
Deux
types de guidelines ont été élaborées en Allemagne. Des guidelines
universitaires dune part, qui veulent répondre au cadre législatif
de la sécurité sociale selon laquelle toute implantation technologique
nouvelle nécessite la preuve de son efficience économique, et des
guidelines issues de la réflexion de lindustrie pharmaceutique
(VFA, 40 research-based compagnies) dautre part.
Les
premières guidelines, développées en collaboration avec la German
Society of Clinical Pharmacology, consistent en 12 points couvrant
lobjectif et le contenu de létude, la mesure des résultats
en termes defficacité réelle, les coûts inclus, les méthodes
danalyse ainsi que la publication des données. Si la méthode
danalyse est libre, la technique coût-bénéfice est peu recommandée
puisque la mesure des coûts intangibles est difficile. Peu exigeants,
ces principes peuvent sappliquer à tous les domaines de la
santé pour lesquels une évaluation économique est nécessaire. Les
guidelines édictés par lindustrie ont pour objectif de fournir
aux médecins prescripteurs des arguments pharmacoéconomiques pour
soutenir leurs actes. Aucune méthodologie nest préconisée,
car les études doivent être conduites selon les " règles
de lart " reconnues internationalement par les experts
en économie de la santé : lobjectif est de démontrer
les propriétés de produits en pratique médicale courante.
De
manière générale cependant, les guidelines pharmacoéconomiques ne
jouent pas un rôle très important en Allemagne dans le contexte
législatif actuel (aucune dentre elles nest dailleurs
imposée par les autorités).
La Belgique
Laccès
des médicaments au remboursement est décidé par le ministère de
la sécurité sociale, sur la base de leur intérêt social, de critères
pharmacothérapeutiques et de critères de prix. Le prix est fixé
par le Ministère des affaires économiques après avis du Conseil
technique des spécialités pharmaceutiques. Lévaluation pharmacoéconomique
a ainsi sa place dans la logique de contrôle de coûts et des volumes.
La
société Belge de Pharmacoépidémiologie a émis des recommandations
méthodologiques pour la réalisation des évaluations économiques
des produits pharmaceutiques à lusage des chercheurs et des
industriels. La technique est laissée au choix des auteurs de létude
(parmi les 4 techniques reconnues : CUA, CEA,CBA, CMA). Le
choix du comparateur doit être justifié entre pratique courante,
pratique minimum, et pratique la plus efficiente. La perspective
dans lidéal est celle de la société. Sur les autres aspects,
ces guidelines rejoignent les principes reconnus par les experts
(actualisation à 5 % et analyse de sensibilité). Leur mise en application
na jamais été cependant intégrée dans un contexte réglementaire
officiel.
Le Danemark
Ladmission
au remboursement des médicaments dépend du Danish Board of Health.
Le taux de prise en charge des médicaments remboursables dépendant
de la gravité de la pathologie.
Les
prix des produits pharmaceutiques sont libres mais ceux qui sont
trop coûteux peuvent ne pas bénéficier du remboursement. Si laccès
au remboursement dépend essentiellement de critères thérapeutiques,
la prise en compte de laspect économique prend de limportance.
Ce
sont les autorités danoises qui ont demandé à un groupe déconomistes
de santé des guidelines pour la standardisation des méthodes dévaluation
des technologies médicales et des services de santé. Depuis 1995,
elles sappliquent dans les décisions de remboursement. Lapproche
est fondée sur la règle des trois T " Things Take Time ".
Ainsi les standards sont instaurés par étapes. La première a été
la base de travail des économistes ; la seconde consiste en
un accord entre les principaux acteurs dont lindustrie. Létape
suivante sera la finalisation du document de base, puis sa mise
en application obligatoire. Les recommandations actuelles sont courtes
et souples. Seul le type danalyse est soumis à une exigence
stricte : coût-utilité et/ou coût-efficacité. La modélisation
et les études pragmatiques peuvent être utilisées. Laspect
méthodologique le plus détaillé concerne les coûts : les coûts
indirects en particulier sont valorisés par lapproche du capital
humain ou par coûts de friction. Les mesures dutilité sont
à privilégier mais une large place est laissée à lavancée
de la recherche dans ce domaine. Aucune recommandation nest
obligatoire pour linstant car des modifications des procédures
réglementaires seraient nécessaires.
LEspagne
Le
Ministère de la santé décide du remboursement des nouveaux médicaments.
Les critères sont nombreux, notamment lutilité thérapeutique
et sociale du produit et la maîtrise des dépenses publiques liées
au médicament. Les médicaments remboursables ont ensuite un prix
fixé par la direction générale de la pharmacie et des produits de
santé, sur les critères suivants :
- coûts industriels
et coûts de R§D ;
- dépenses
de promotion et de publicité et bénéfices de lentreprise.
Il
a été prévu la mise en place dun système de prix de référence
pour les médicaments remboursables mais ce projet est critiqué par
les industriels espagnols (Farmaindustria) pour lesquels les prix
sont déjà très bas. Actuellement, lutilisation de la pharmacoéconomie
comme aide aux décisions des pouvoirs publics est très limitée encore
en Espagne mais son utilité commence à être reconnue. Dès 1991,
une réflexion a été menée à luniversité de Barcelone à la
demande du Ministère de la santé. Des guidelines ont été finalisés
à partir de ce document de travail en 1993 par la Direction générale
dAssurance et de Planification en santé. Elles nont
pas de caractère formel et ont pour but dassurer une comparabilité
des résultats détudes sur les plans théoriques et pratiques.
Les standards de base à respecter sont : les analyses de types coût/efficacité
et coût-utilité, avec la société en perpective. Les économistes
nont en revanche pas tranché sur le choix des comparateurs
et linclusion des coûts indirects.
Lutilisation
de ces guidelines est envisagée dans le cadre :
- des autorisations
de commercialisation et dutilisation des technologies médicales ;
- des fixations
de prix des produits pharmaceutiques ;
- du financement
public : pour ladmission au remboursement ou pour dautres
prévisions budgétaires dinvestissement dans un programme
particulier ;
- des guidelines
ou incitations pour lutilisation dune technologie :
intégration dans des recommandations de prescriptions médicales.
Reste
à élaborer un manuel à lintention des entreprises, pour supporter
la mise en uvre de ces guidelines, mais cet objectif semble
envisageable à long terme seulement et subordonné à une véritable
volonté du gouvernement.
La Finlande
La
commission de remboursement du médicament (dépend du Ministère de
la santé) qui examine toutes les demandes de remboursement et fixations
de prix. Le remboursement est décidé en fonction du critère de gravité
de la pathologie traitée. Le prix des médicaments remboursables
est contrôlé : le prix fabricant maximum est défini par le
Comité de fixation des prix (Pharmaceutical Pricing Board) et sert
de référence pour tout remboursement.
La
fixation du prix tient compte des coûts de fabrication et de R§D,
du prix du produit dans dautres pays européens, du prix des
médicaments similaires en Finlande. Prix et remboursement sont obtenus
pour trois ans puis le dossier du produit est réexaminé tous les
5 ans.
Les
facteurs économiques prennent de plus en plus dimportance
dans les décisions prises. La Finlande est le premier pays européen
à avoir officiellement implanté des guidelines pharmacoéconomiques
pour laccès au remboursement et la fixation du prix associé
pour les nouveaux produits (nouveaux principes actifs). Après une
expérimentation dune année, elles sont devenues obligatoires
depuis le 1er juin 1999.
Depuis
1998 en effet, les industriels devaient présenter un rapport pharmacoéconomique
non encore standardisé dans le cadre des négociations de prix fabricant
maximum. Cette phase test a permis de formaliser les guidelines
dans leur version finale, en prenant aussi en compte lopinion
de lindustrie pharmaceutique finlandaise. Leur contenu est
très peu exigeant, à la différence de lAustralie et du Canada.
Les industriels doivent démontrer les bénéfices thérapeutiques et
économiques de leurs nouveaux produits, du point de vue de la société.
La modélisation est autorisée, si les données issues de conditions
détudes et celles provenant de situations de traitement normal
sont présentées séparément. Les quatre méthodes standard danalyse
sont acceptées. Dans les textes des guidelines, le terme " évaluation "
nest volontairement pas employé car leur objectif est " destimer
les aspects économie de santé " par une approche plus
simple que celle dune véritable " évaluation ".
La révision annuelle des guidelines a été prévue au printemps 2000,
après un travail de collaboration entre le gouvernement et les industriels.
Suite
et fin (2/2)
31 mai 2000
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