La
grille Aggir
Un
outil pour objectiver la dépendance
Christine
BOUCHET
5 novembre
1999
Le
nombre de personnes âgées dépendantes est en constante augmentation.
La définition couramment admise de la dépendance est le besoin d'un
tierce personne pour effectuer les actes de la vie courante (se
laver, se déplacer, s'alimenter, s'habiller). La dépendance est
dite lourde quand la personne ne peut accomplir seule trois des
quatre actes élémentaires. Dans ce cadre, la grille Aggir (Autonomie
Gérontologique - groupes iso-ressources) a été élaborée il y a quelques
années pour déterminer les ressources nécessaires à la prise en
charge d'une personne dépendante.
La
grille Aggir
Elle permet d'évaluer
l'autonomie et de regrouper les malades en six groupes iso-ressources.
L'état de santé des patients est appréhendé par les degrés d'autonomie,
les consommations d'aide par les niveaux de dépendance.
Cette grille a été
élaborée par des médecins de la Sécurité sociale, de la Société
Française de Gérontologie et des informaticiens. Ceux-ci ont analysés
les items communs à 450 échelles existantes (MiniMental State, Activity
of Daily Living de Katz, Instrumental ADL de Lawton
) et repéré
les plus pertinents.
C'est loutil
légal dévaluation de la dépendance dans le cadre de la loi
97-60 du 24 janvier 1997 depuis sa désignation par le décret
97-427 du 28 avril 1997. Son objectif est la gestion des ressources.
Les
variables
10 variables discriminantes
doivent être codées :
Variable
|
Contenu
|
Cohérence
|
Converser,
se comporter de façon logique et sensée
|
Orientation
|
Se
repérer dans le temps et les lieux |
Toilette
|
Hygiène
corporelle |
Habillage
|
S'habiller,
se déshabiller, se présenter |
Alimentation
|
Se
servir et manger les aliments préparés |
Elimination
|
NC |
Transferts
|
Se
lever, se coucher, s'asseoir |
Déplacement
à l'intérieur
|
Avec
ou sans canne, déambulateur, fauteuil roulant |
Déplacement
à l'extérieur
|
A
partir de la porte d'entrée sans moyen de transport |
Communication
à distance
|
Utiliser
le téléphone, les alarmes, la sonnette |
Chaque variable a 3
modalités :
A : fait spontanément seul, habituellement
et correctement (suppose qu'il n'existe pas d'incitation)
B : fait partiellement ou non habituellement ou non correctement
C : ne fait pas
Il sagit dune
grille et non dun questionnaire. Le médecin évaluateur est
donc libre d'apprécier chaque item (cohérence, orientation) à sa
façon. Lobservation porte sur ce que fait la personne, en
excluant ce que font les soignants. Les aides matérielles, comme
un fauteuil roulant ou une prothèse auditive, sont considérées comme
faisant partie de la personne.
Il existe également
7 variables illustratives qui ne sont pas prises en compte pour
lattribution des moyens (gestion - cuisine - ménage - transports
- achat - suivi du traitement - activités de temps libre).
La
constitution des groupes iso-ressources
Un groupe iso-ressources
(GIR) est une notion économique. C'est un ensemble de personnes
qui nécessitent une même mobilisation de ressources pour faire face
à la dépendance. Les GIR sont établis à partir des items de la grille
Aggir en utilisant un algorithme complexe qui a été publié au JO
du 30 avril 1997. En pratique, il faut utiliser un logiciel
de classement en GIR comme le logiciel Galaad élaboré par la CNAM
ou les logiciels Aggir et Argos du Syndicat National de Gérontologie
Clinique.
Par exemple, l'association
des modalités CCCCBCCCCC classera le sujet dans le GIR 1, l'association
AACCAAAABA dans le groupe 3.
Un
outil controversé
L'outil Aggir a été
largement discuté, en particulier par les gérontologues. En effet,
le modèle a été conçu à partir dune étude en milieu hospitalier
sur 10 000 sujets, initialement pour modéliser la charge
en soins en institution. Son utilisation a ensuite été élargie au
patient à domicile, sans aucune validation spécifique. Les gérontologues
pensent que cette transposition est discutable, et que le besoin
de surveillance à domicile, par exemple, nest pas pris en
compte. En outre, seuls les signes déficitaires figurent dans la
grille, mais pas les signes "productifs" comme l'agitation
ou la fugue.
Par ailleurs, l'algorithme
de classement en GIR est une "boîte noire" issue d'un
traitement statistique des données par régression linéaire multiple.
Des modifications mineures de lalgorithme pourraient donner
des résultats très différents et la stabilité du modèle est discutable.
En effet, des choix ditems légèrement différents peuvent donner
des résultats GIR très éloignés - le changement dune seule
modalité de variable peut entraîner un changement de plusieurs GIR
(dans certains cas, par exemple, si l'orientation passe de B à C,
le GIR peut passer de 6 - absence de dépendance - à 2 - dépendance
quasi maximale). Plus grave, des incohérences ont été relevées :l'aggravation
d'une variable peut se traduire par une amélioration du GIR dans
une trentaine de cas.
La grille Aggir n'est
toutefois pas un outil sans intérêt. Elle est cohérente dans son
objectif, à savoir l'allocation de ressources pour le sujet dépendant,
et elle représente un consensus pour lévaluation des capacités
restantes. Il faut toutefois connaître ses limites, et ne pas chercher
à l'utiliser dans d'autres buts que la détermination des dépenses
liées aux aides à fournir au sujet dépendant.
Suite
(2/2)
5 novembre 1999
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